1917

Nicolas Boukharine, L´économie mondiale et l´impérialisme. Esquisse économique,

Paris : Anthropos, 1971 (première édition 1917), pp. 55-74.

N. Boukharine

L´économie mondiale et l´impérialisme

Deuxième partie : L'économie mondiale et le processus de nationalisation du capital

CHAPITRE IV. La structure interne des économies nationales et la politique douanière

Comme nous l'avons vu précédemment, l'économie mondiale offre l'aspect d'un immense réseau enchevêtré de liens économiques les plus divers, basés sur les rapports de production considérés dans leur ampleur mondiale. Ces liens économiques, qui relient la multitude des économies individuelles, se resserrent, deviennent plus denses, si nous nous mettons à examiner les économies nationales dans le cadre de l'économie mondiale, c'est-à-dire les liens économiques qui existent dans les limites des unités d'Etat. Il n'appert nullement de cette constatation que le principe étatique joue une sorte de rôle créateur spécifique en faisant surgir de lui-même les propres formes de la vie économique nationale. Il ne s'agit pas non plus d'une sorte d'harmonie préétablie entre la « société » et l'« Etat ». L'explication en est beaucoup plus facile. Le processus même de constitution des Etats modernes, en tant que forme politique déterminée, a été engendré par des besoins et des nécessités économiques. L'Etat s'est développé sur le fondement économique et n'a été que l'expression de la liaison économique. La cohésion étatique n'a été que l'expression de la cohésion économique. Comme toute forme vivante, l'économie nationale subit et subissait un processus incessant de transfiguration interne. Les mouvements moléculaires qui suivaient parallèlement le développement des forces productives, modifiaient constamment la position des corps économiques nationaux isolés les uns des autres, c'est-à-dire influaient sur les rapports entre les parties séparées de l'économie mondiale en formation. Notre époque engendre des rapports exceptionnels. La destruction totale des anciennes formes économiques conservatrices, qui commença avec l'apparition des premiers embryons du capitalisme, est pourtant un fait indubitable. Mais en même temps, cette élimination organique de concurrents plus faibles dans le cadre des économies nationales (ruine des métiers, disparition des formes intermédiaires, développement de la grosse industrie, etc.), fait place aujourd'hui à une période critique de lutte âpre d'adversaires formidables sur le marché mondial. Il en faut chercher les causes, avant tout, dans les transformations internes qui se sont produites dans la structure des capitalismes nationaux et qui ont amené des bouleversements profonds dans leurs rapports.

Ces transformations se manifestent, en premier lieu, par la formation et l'expansion extraordinairement rapide des monopoles capitalistes : cartels, syndicats industriels, trusts, consortiums de banques [1].

Nous avons vu quelle est la force de ce processus dans le domaine international. Or sa force est infiniment plus grande dans le cadre des économies nationales. Comme nous le verrons plus loin, la cartellisation nationale de l'industrie est précisément un des principaux facteurs d'agglomération nationale du capital.

Le processus d'organisation des monopoles capitalistes est la suite logique et historique du processus de concentration et de centralisation. De même que sur les débris du monopole féodal est née la libre concurrence des artisans qui a conduit au monopole de la classe capitaliste sur les moyens de production, de même la libre concurrence dans la classe capitaliste fait place de plus en plus à la limitation de cette concurrence et à la formation d'économies gigantesques qui monopolisent la totalité du marché national. En aucune façon ces économies ne peuvent être considérées comme des phénomènes « anormaux » ou « artificiels » dus à des encouragements de l'Etat, comme par exemple les droits de douane, les tarifs de chemins de fer, les primes, les commandes ou les subsides gouvernementaux, etc. Certes, toutes ces « causes » ont contribué à accélérer le processus, mais elles n'en ont pas été et n'en sont pas davantage la condition nécessaire. Par contre, un certain degré de concentration de l'industrie en est la condition sine qua non. Ainsi, plus les forces productives d'un pays sont développées, plus les monopoles sont puissants. Sous ce rapport, un rôle spécial a été joué par le système d'entreprises anonymes qui a singulièrement facilité l'investissement de capital dans la production et qui a fait surgir des entreprises d'une ampleur sans précèdent. Il est très compréhensible que le mouvement de « cartellisation » ait à sa tête deux pays qui ont occupé avec une célérité fébrile les premières places sur le marché mondial : les Etats-Unis et l'Allemagne.

Les Etats-Unis sont un exemple classique du développement économique moderne. Quant à la forme la plus centralisée des monopoles — les trusts — elle y a poussé de profondes racines. Le tableau ci-dessous donne une idée claire de la formidable puissance économique des trusts — des principaux trusts notamment — comme du processus de leur développement.

D'après les chiffres de Moody, l'accroissement des trusts pour la période de 1907 à 1908 a été le suivant :

Classification des TrustsNombre de sociétés de contrôle et de sociétés acquises en 1907Montant des capitaux en actions et obligations en dollars en 1907 Nombre de sociétés de contrôle et de sociétés acquises en 1908 Montant des capitaux en actions et obligations en dollars en 1908 
Sept principaux trusts industriels 1524 2.662.752.100 1638 2.708.438.754
Trusts industriels de moindre importance 3426 4.055.039.433 5038 8.243.185.000
Trusts en cours de réorganisation  282 528.551.000 ------ ------
Total des trusts industriels  5232 7.246.342.533 6676 10.951.623.754
Entreprises concessionnaires 1336 3.735.456.071 2599 7.789.39
Groupe des principaux chemins de fer  1040 9.397.363.907 745 12.931.154.010
Total 7608 20.379.162.511 10.020 31.672.171.364  [2]

D'après le Poors Manuel of Corporations et le Poors of Railrouds de 1910, le deuxième chiffre du total s'élève à 33,3 milliards de dollars [3]. Dès 1900, la part des trusts dans la production nationale était très élevée. Elle atteignait dans l'industrie textile 50 % de la production globale ; dans la verrerie, 54 % ; dans l'industrie du livre et du papier, 60 % ; dans l'alimentation, 62 % ; dans l'industrie des spiritueux, 72 % ; dans la métallurgie (sauf le fer et l'acier), 77 % ; dans l'industrie chimique, 81 % ; dans la fabrication du fer et de l'acier, 81 % [4]. Depuis, elle a sensiblement augmenté du fait qu'aux Etats-Unis le processus de concentration et de centralisation s'opère à une allure prodigieuse. « Seuls, quelques hommes au courant du récent développement de l'organisation financière de la grande industrie et des branches commerciales, peuvent se faire une idée de la concentration gigantesque et de la domination dont font l'objet les grandes entreprises combinées et différenciées qui englobent fréquemment des forces productives sortant du cadre d'une économie nationale isolée » [5]. Faute de place, nous ne pouvons, dans cet ouvrage, donner même la simple énumération des principaux trusts existant dans les diverses branches. Bornons-nous à signaler qu'en tête du mouvement opèrent deux trusts immenses : le trust du pétrole (Standard Oil Cº) et le trust de l'acier (United States Steel Corporation), qui correspondent à deux groupes financiers : Rockefeller et Morgan.

On observe, en Allemagne, un mouvement analogue du grand capital En 1905, les statistiques officielles mentionnaient 385 cartels dans les diverses branches de la production. Le théoricien et l'organisateur bien connu du mouvement de « cartellisation » en Allemagne, le docteur Tschierschky, évalue de 560 à 600 le nombre des cartels allemands [6].

Les plus importants sont deux syndicats industriels : le Syndicat houiller du Rhin et de la Westphalie (Rheinisch-Westfälisches Kohlensyndicat) et le Syndicat de l'Acier (Stahlwerksverband). D'après les chiffres de Raffalovitch, le premier a produit, en 1905, dans le bassin de Dortmund, 85 millions de tonnes de houille, tandis que tous les outsiders réunis (c'est-à-dire ceux qui n'appartiennent pas au syndicat) n'en ont produit que 4.200.000 (4,9 %) [7]. En janvier 1913, la production de houille du syndicat s'élevait à 92,6 % de la production totale du bassin de la Ruhr et à 54 % de la production nationale. Le Syndicat de l'Acier porta à 43-44 % sa part dans la production du pays. Le Syndicat du Sucre (raffineries), qui englobe 47 entreprises, donne un chiffre très élevé (70 % de la vente intérieure et 80 % de la vente extérieure) [8]. Le trust de l'électricité, détenu par les deux trusts Siemens-Schuckert et A. E. G.) représente 40 % de toute l'énergie produite, etc.

Dans les autres pays, les monopoles n'ont pas cette ampleur, mais pris dans un sens absolu, et non par rapport aux Etats-Unis ou à l'Allemagne, le processus de « syndicalisation » y est très important.

En France, il existe un grand nombre de syndicats industriels dans la métallurgie, l'industrie du sucre, la verrerie, I'industrie du papier, I'industrie pétroléenne, l'industrie chimique, le textile, l'industrie de la pierre, etc. Les plus importants sont : le Comptoir de Longwy, qui écoule presque toute la fonte fabriquée en France, le Syndicat du Sucre, dont l'hégémonie sur le marché est presque complète ; la Société Générale des Glaces de Saint-Gobain, qui exerce également un monopole presque complet, etc. Il faut encore mentionner une série de syndicats agricoles, avec lesquels les associations agricoles sont en rapports étroits [9] ainsi que de grandes unions dans l'industrie des transports. Trois compagnies maritimes (Compagnie Générale Transatlantique, Messageries Maritimes et Chargeurs Réunis, groupent 41,25 % de toute la marine marchande de la France [10].

En Angleterre, où pendant pas mal de temps, pour de multiples raisons, le mouvement de formation des monopoles fut tres faible, malgré la grande concentration de l'industrie, la trustisation de l'industrie (amalgamations, associations investment trusts) a fait, au cours de ces dernières années, d´immenses progrès. Le libre échange anglais est aujourd'hui du domaine de l'histoire (nous verrons plus bas que, même sous le rapport de la politique économique extérieure, la libre concurrence, c'est-à-dire la politique du libre échange passe de plus en plus à l'arrière-plan). Ce n'est que par ignorance que l'on citerait aujourd'hui l'Angleterre comme l'incarnation d'un régime économique spécifique. A titre d'exemple, nous énumérerons quelques trusts : le trust du ciment de Portland (Association Portland Cement Manufactures), qui représente 89 % de la production nationale ; les trusts de l'acier ; les trusts des spiritueux ; les trusts des manufactures de tapisseries (98 % de la production des tapisseries et autres matières décoratives du pays) ; le trust des fabriques de câbles (The Cable Makers' Association, environ 90 % de la production totale), le trust du sel (Salt Union, 90 % environ de la production), The fine cotton spinners and doublers' trust (qui contrôle en fait la totalité de la production anglaise), le trust de teinture et de blanchiment (Blenachers Association et The Dyers' Association, 90 % environ de la production) ; Imperial Tobacco Company (environ la moitié de la production totale), etc. [11].

En Autriche, les principaux cartels sont : le syndicat des houillères de Bohême, qui représente 90 % de la production autrichienne ; le syndicat des briqueteries, dont la production se monte à 400 millions de couronnes (pour 40 millions seulement aux outsiders) ; le syndicat de la sidérurgie ; les syndicats dans l'industrie du pétrole (Galicie, 40 % de la production) ; dans l'industrie du sucre, du verre, du papier, du textile, etc.

Mais même dans un pays arriéré et pauvre en capitaux comme la Russie, le nombre des syndicats industriels d'un type supérieur et des trusts, d'après les données de Goldstein, dépasse la centaine. En outre, il existe une série d'ententes locales d'un type moins développé. Mentionnons les principales [12]. Dans l'industrie houillère, le Prodougol (qui représente 60 % de la production du bassin du Donetz) ; dans la métallurgie, 19 syndicats, dont les plus importants sont : le Prodameta (88-93 %), le Kroalia (60 % de la tôle), le Prodwagon (qui englobe 14 ateliers de construction sur 16) ; dans l'industrie du naphte, 4 compagnies associées détenant presque toute la production. Mentionnons encore le syndicat du cuivre (90 %), le syndicat du sucre (100 %), l'entente des fabricants de textile, le trust du tabac (57-58 %), le syndicat des allumettes, etc.

En Belgique, les syndicats industriels sont extrêmement développés Mais même les pays nouveaux, comme le Japon, se sont engagés dans la voie des monopoles capitalistes. Ainsi les anciens modes de production du capitalisme se sont radicalement transformés. D'après les calculs de F. Laur, sur les 500 milliards de francs de capitaux investis dans les entreprises industrielles de tous les pays du monde, 225 milliards, c'est-à-dire presque la moitié, échoient aux cartels et aux trusts, (Ce capital se décompose par pays [à noter que les chiffres sont vraisemblablement au-dessous de la réalité] de la façon suivante : Amérique, 100 milliards de francs ; Allemagne, 50 milliards ; France, 30 milliards ; Autriche-Hongrie, 25 milliards, etc. [13]. Ces chiffres soulignent la complète transformation des anciens éléments de production à l'intérieur des pays, ce qui n'a pas été sans amener de profondes modifications dans leurs rapports.

Les choses ne se bornent pas cependant à un processus d'organisation au sein de branches industrielles isolées. Celles-ci passent par un processus incessant d'agglomération en un seul système, de transformation en organisation unique.

Ce processus s'opère en premier lieu par la création d'entreprises combinées, c'est-à-dire d'entreprises embrassant la production des matières premières et des produits manufacturés, ouvrés ou mi-ouvrés, etc. Il peut englober et englobe les branches les plus diverses de la production, du fait qu'avec la division moderne du travail, ces branches, à un degré plus ou moins élevé, directement ou indirectement, sont placées dans une dépendance mutuelle. Si par exemple un trust travaille, à côté du produit essentiel, un dérivé quelconque, il aspire aussitôt à monopoliser cette branche de production, ce qui, à son tour, a pour résultat de pousser à la monopolisation le la fabrication des produits qui remplacent ce dérivé. Puis c'est la production des matières premières qui, elle aussi, devient l'objet des mêmes convoitises, etc. Il se forme ainsi les combinaisons les moins compréhensibles à première vue, comme l'union des industries des métaux et du ciment, du pétrole et de la glucose, etc. [14]. Cette concentration et cette centralisation verticales de la production, par opposition à la concentration et à la centralisation horizontales dans certaines branches de production, d'une part signifient une diminution de la division sociale du travail (car elles fondent dans une seule entreprise le travail réparti auparavant dans plusieurs), d'autre part, stimulent la division du travail dans le cadre de la nouvelle unité de production. Ainsi, tout le processus, considéré à l'échelle sociale, a tendance à transformer l'ensemble de l'économie nationale en une entreprise combinée unique, avec un lien d'organisation reliant la totalité des branches de la production.

Dans une large mesure, le même processus s'opère encore par la pénétration du capital bancaire dans l'industrie et la transformation du capital en capital financier.

Nous avons déjà vu, dans les chapitres précédents, l'immense portée de la participation financière aux entreprises industrielles. Or, celle-ci est précisément une des fonctions des banques modernes.

Une partie toujours plus grande de capital industriel n'appartient pas aux industriels qui le mettent en circulation. Ils ne disposent de ce capital que par l'entremise de la banque qui représente vis-à-vis d'eux les propriétaires de ce capital. D'autre part, la banque est elle-même obligée d'engager dans l'industrie une part de plus en plus grande de ses capitaux. Il en résulte que la banque devient de plus en plus un capitaliste industriel. Ce capital bancaire, c'est-à-dire ce capital-argent, qui est ainsi transformé effectivement en capital industriel, je l'appelle capital financier [15].

Au moyen de diverses formes de crédit, de détention d'actions, d'obligations et de parts de fondateur, le capital bancaire opère ainsi comme organisateur de l'industrie, et cette organisation de l'ensemble de la production de la totalité du pays est d'autant plus forte que l'est, d'une part, la concentration de l'industrie et, d'autre part, la concentration des banques. Celle-ci a pris à son tour des proportions considérables. Qu'on en juge par ces exemples. En Allemagne, 6 banques exercent en fait le monopole des opérations de banque : la Deutsche Bank, la Diskontogesellschaft, la Darmstädter Bank, la Dresdner Bank, la Berliner Handelsgesellschaft et la Schaffhausenscher Bankverein, dont les capitaux atteignaient, en 1910, le chiffre de 1.122,6 milliards de marks [16]. La multiplication, en Allemagne même, des établissements de ces banques, donne une idée de la rapidité avec laquelle leur puissance s'est développée (dans le nombre sont compris, l'établissement principal, les filiales, les caisses de dépôts, les comptoirs de change, les « participations » constantes dans les banques anonymes allemandes). Ce nombre a évolué de la façon suivante : en 1895, 42 ; en 1896, 48 ; en 1900, 80 ; en 1902, 127 ; en 1905, 194 ; en 1911, 450 [17]. En l'espace de 16 ans, le nombre de ces établissements s'est donc accru de 11 fois.

En Amérique, deux banques à elles seules détiennent le monopole : la National City Bank (Rockefeller) et la National Bank of Commerce (Morgan). Une infinité d'entreprises industrielles et de banques liées entre elles de multiples façons dépendent d'elles. a On aura une idée approximative de l'ampleur des opérations bancaires des groupes Rockefeller et Morgan, lorsqu'on saura qu´en l908 le premier avait, comme clients dont il gardait les réserves, 3.360 banques du pays ou autres, et le second, 2.757 banques. Sans eux, aucun nouveau trust ne peut être fondé. C'est le « monopole de la production des monopoles » (monopoly of monopoly making) [18].

A cette liaison économique spécifique, entre les banques et les diverses branches de la production, correspond un mode particulier de direction supérieure des unes et des autres : les représentants des industriels administrent les banques et vice versa. Jeidels relate qu'en 1903, les six banques allemandes mentionnées ci-dessus détenaient 751 places dans les conseils d'administration des sociétés anonymes industrielles [19]. En revanche, dans les conseils d'administration de ces banques, figurent 51 représentants de I'industrie (dernier chiffre pour 1910).

Quant à l'Amérique le fait suivant est caractéristique. Il ressort de la liste présentée au Sénat, en 1908, lors de la discussion du bill sur l'amélioration des opérations de banque (commission La Folette) que 89 personnes occupent plus de 2.000 places de directeurs dans diverses entreprises industrielles, compagnies de transport, etc. et que, d'autre part, Morgan et Rockefeller ont sous leur contrôle direct ou indirect la quasi-totalité de ces entreprises [20].

Nous devons encore mentionner le rôle important que jouent les entreprises étatiques et communales qui entrent dans le système général de l'économie nationale. Les entreprises étatiques s'étendent principalement sur une partie de l'industrie extractive du pays. (En Allemagne, sur 309 mines de houille ayant, en 1909, une production de 145 millions de tonnes, 27 représentant une production de 20.500.000 tonnes, d'une valeur de 235 millions de marks, se trouvaient entre les mains de l'Etat. Il faut y ajouter les mines de sel, les minerais, etc. Le total des recettes provenant de toutes ces entreprises d'Etat se montait, en 1910, à 349 millions brut et à 25 millions net [21]. Ensuite, viennent les chemins de fer (l´organisation commerciale privée des chemins de fer existait uniquement en Angleterre et encore prit-elle fin au début de la guerre), les postes et télégraphes, etc., ainsi que l'exploitation forestière. Les entreprises communales d'une grande importance économique concernent principalement le service des eaux, les usines à gaz, les usines électriques et l'ensemble de leurs ramifications [22]. Les puissantes banques d'Etat entrent également dans le système général. Les modes d'interdépendance de ces entreprises « publiques », et des entreprises économiques privées sont multiples, de même que les liens économiques en général, mais il est évident que le crédit joue le principal rôle. Des rapports particulièrement étroits s'établissent sur la base de ce qu'on appelle le système mixte, lorsqu'une entreprise donnée se compose d'éléments « publics » et d'éléments privés (ordinairement il s'agit de la participation des grands monopoles). Ce système se rencontre assez fréquemment dans le domaine des exploitations communales. Le cas de la Reichsbank est très curieux. Cette banque, dont le rôle économique en Allemagne est immense, est si intimement lice à la vie économique privée que, jusqu'à présent, on discute pour savoir si elle est un simple établissement anonyme ou une institution d'Etat, et si elle a un caractère juridique public, ou privé [23].

Toutes les pièces de ce système, organisé dans une large mesure, (cartels, banques, entreprises d'Etat), font l'objet d'un processus incessant d'intégration Ce processus s'accentue au fur et à mesure du développement de la concentration capitaliste. La "cartellisation" et la formation d'entreprises combinées créent tout de suite une communauté d'intérêts entre les banques qui les financent. De leur côté, les banques sont intéressées à voir cesser la concurrence entre les entreprises qu'elles financent. D'autre part, toute entente des banques facilite l'agglomération des groupes industriels. Quant aux entreprises d'Etat, elles deviennent de plus en plus dépendantes des grands groupements industriels et financiers, et vice versa.

Ainsi, les différentes sphères du processus de concentration et d'organisation se stimulent réciproquement et créent une très forte tendance à la transformation de toute l'économie nationale en une gigantesque entreprise combinée sous l'égide des magnats de la finance et de l'Etat capitaliste, d'une économie qui monopolise le marché mondial et qui devient la condition nécessaire de la production organisée dans sa forme supérieure non-capitaliste.

Le capitalisme mondial, le système de production mondial, prennent par conséquent, au cours de ces dernières années, I'aspect suivant : quelques corps économiques organisés et cohérents (grandes puissances civilisées) et une périphérie de pays retardataires vivant sous un régime agraire ou semi-agraire. Le processus d'organisation (qui, soit dit en passant, n'est nullement le but ou le motif agissant de messieurs les capitalistes, comme l'affirment leurs idéologues, mais uniquement le résultat objectif de leurs aspirations à un profit maximum) tend à sortir du cadre national ; mais là apparaissent des difficultés beaucoup plus sérieuses. Premièrement, il est bien plus facile de vaincre la concurrence sur le terrain national que sur le terrain mondial (les ententes internationales se forment généralement sur la base de monopoles nationaux déjà constitués) ; deuxièmement, la différence de structure économique et, par conséquent, de frais de production, rend les ententes onéreuses pour les groupes nationaux avancés ; troisièmement, l'agglomération avec l'Etat et ses frontières constitue elle-même un monopole toujours croissant, qui assure des profits supplémentaires.

Parmi les facteurs de cette dernière catégorie, nous examinerons tout d'abord la politique douanière.

Le caractère de cette politique s'est entièrement modifié. Si les anciens droits de douane avaient un but défensif, il n'en est pas de même des droits actuels, qui ont un but offensif. Si, auparavant, on frappait les articles dont la fabrication dans le pays était si peu développée qu'elle ne supportait pas la concurrence sur le marché mondial, aujourd'hui, par contre, on « protège », précisément, les branches industrielles les plus aptes à soutenir la concurrence

Friedrich List, apôtre du protectionnisme, a parlé, dans son Système national d'économie politique, des droits de douane éducatifs, qu'il considérait comme une mesure provisoire. « Nous devrons — lisons-nous dans son ouvrage — ne traiter ici que de la législation douanière en tant que moyen de former l'industrie. Les mesures de protection ne se justifient que si elles sont un moyen d'encourager et de protéger la force manufacturière intérieure, et cela seulement chez les nations... appelées à se placer sur un pied d'égalité avec les premières nations agricoles, manufacturières, commerciales et les grandes puissances navales et continentales » [24].

Aujourd'hui, rien de cela ne subsiste, même en souvenir, en dépit des assurances de certains érudits bourgeois. Le « protectionnisme supérieur », de nos jours, n'est pas autre chose que la formule étatique de la politique économique des cartels. Les droits de douane modernes sont des droits de cartels, un moyen pour ceux-ci d'acquérir un profit supplémentaire. Car il est clair que si, sur le marché extérieur, la concurrence est supprimée ou réduite au minimum, les « producteurs » peuvent hausser les prix dans toute la marge laissée par les droits de douane. Or ce profit supplémentaire donne la possibilité d'écouler les marchandises sur le marché extérieur à des prix inférieurs aux prix de revient, « à vil prix ». Ainsi se forme la politique d'exportation spécifique des cartels (dumping). Ainsi s'explique cette chose, étrange au premier abord, que les droits de douane moderne « protègent » l'industrie d'exportation. Déjà Engels avait vu clairement l'étroite connexion qu'il y a entre le développement des cartels et l'augmentation des droits de douane modernes avec leur caractère spécifique.

Les capitalistes acquièrent de plus en plus la conviction que les forces productives modernes, avec leur développement rapide et gigantesque, échappent tous les jours davantage aux lois de l'échange capitaliste qui devraient les diriger. Les deux symptômes suivants l'établissent à l'évidence :
1) la nouvelle et universelle manie des droits de protection, qui se distingue de l'ancienne idée protectionniste en ce qu'elle poursuit avant tout la protection des articles susceptibles d'exportation ;
2) les cartels et les trusts qui se créent dans les grandes branches de production [25].

Or, notre époque a fait précisément un immense progrès dans ce sens et l'industrie consolidée, en tête avec l'industrie lourde, soutient ardemment un protectionnisme supérieur, puisque moins les droits de douane sont réduits, plus le profit supplémentaire est important, plus l'on peut conquérir rapidement de nouveaux débouchés et plus la masse de profits obtenue est considérable. La seule borne qu'il puisse y avoir, c'est la diminution de la demande qui, dès lors, n'est plus compensée par des prix plus élevés, mais dans ces limites la tendance à la hausse est un fait incontestable.

Si nous examinons maintenant l'économie mondiale, nous y découvrons que les droits de douane de cartels et le « dumping » des pays économiquement avancés suscitent la résistance des pays retardataires, qui élèvent leurs tarifs protecteurs [26]. Inversement, l'augmentation des droits de douane par les pays retardataires stimule encore davantage l'augmentation des droits de douane de cartels qui facilitent le « dumping ». Inutile de dire que cette action réciproque se manifeste également dans les rapports entre pays avancés, de même que dans les rapports entre pays retardataires. Cette vis illimitée, continuellement tournée par le développement des cartels, a engendré la « manie des droits de protection » dont parle Engels et qui, de nos jours, s'est encore aggravée.

Vers 1870, dans tous les pays les plus développés économiquement, on constate un brusque revirement à l'égard du libre-échange qui, évoluant rapidement de l'« éducation » de l'industrie à la défense des cartels, aboutit au haut protectionnisme moderne.

En Allemagne, ce revirement a été défini par le tarif de 1879, et depuis nous avons une augmentation incessante des droits de douane (voir, par exemple, le tarif de 1902 et les suivants). En Autriche-Hongrie, ce revirement date de 1878 ; les tarifs ultérieurs témoignent de la même tendance à la hausse (notamment les tarifs de 1882, 1887, 1906 et les suivants). En France, on constate un glissement très net vers le protectionnisme dans le tarif général de 1881, qui élève les droits sur les produits industriels de 24 % ; il faut encore signaler le tarif éminemment protectionniste de 1892 (qui porte à 69 % ad valorem les droits sur les articles manufacturés, à 25 %, les droits sur les produits agricoles) et sa « révision » en 1910. En Espagne, le tarif de 1877 renferme déjà des droits élevés sur les produits industriels ; le tarif de 1906, contenant une augmentation générale des droits, mérite une attention spéciale. Aux Etats-Unis, pays classique des trusts et de la politique douanière moderne, les traits caractéristiques du protectionnisme sont particulièrement accusés. L'augmentation des droits de douane, causée par les trusts, date de 1883, et atteint 40 % de la valeur des marchandises imposées ; en 1887, elle est de 47,11 % ; en 1890 (bill Mac Kinley), nouvelle augmentation (91 % sur les lainages ; sur les qualités fines, jusqu'à 150 %) ; sur les métaux importés (de 40 à 80 %, etc.) [27]. Puis viennent le Dingley Bill (1897) et, comme une des manifestations les plus nettes de la tendance à la hausse, le Payne-Tarif de 1909. L'Angleterre, cette citadelle du libre-échange, traverse une époque de transformation. De plus en plus hautes, de plus en plus impérieuses, se font les voix qui exigent la « réforme douanière », le remplacement du free-trade (libre-échange) par le fair-trade (juste-échange), c'est-à-dire le système protectionniste (v., p. e. l'activité de Chamberlain, l'Imperial Federation League et l'United Empire League, etc.). Le système des tarifs préférentiels entre le monopole et les colonies réalise en partie ces aspirations. A partir de 1898, le Canada établit des tarifs de faveur avec la métropole ; en 1900 et 1906, ces tarifs sont révisés et « améliorés ». Aujourd'hui, cette faveur est de 10 à 50 % par rapport aux droits qui frappent les produits étrangers. En 1909, l'exemple du Canada est suivi par les colonies de l'Afrique du Sud (de 6,25% à 25 %) ; en 1903 et 1907, la Nouvelle Zélande y adhère, puis, en 1907, l'Union des colonies australiennes (de 5 à 10 %). Aux conférences impériales (c'est-à-dire aux conférences des représentants des colonies du Gouvernement britannique), la note protectionniste se fait entendre de plus en plus nettement ». Seul un penseur de second ordre peut être, aujourd'hui, partisan du libre-échange et être en même temps optimiste à l'égard de l'Angleterre », raisonne, avec une fatuité de bourgeois, le savant bien connu Aschli, traduisant ainsi l'état d'esprit des classes dominantes anglaises [28].

On sait que la guerre a mis les points sur les i et que l'imposition douanière est devenue un fait. Il nous faut encore mentionner les droits de douane extrêmement élevés de la Russie.

A partir de 1877, écrit M. Kourtchinsky, une nouvelle tendance apparaît, qui marque de plus en plus le passage à Un tarif douanier élevé qui, par la suite, devait aller constamment en s'accentuant. En 1877, cette augmentation des droits de douane fut la conséquence de la décision prise de percevoir ces droits sur la base de l'étalon or, ce qui, d'emblée, entraîna une majoration approximative de 40 %. Les années suivantes apportèrent une nouvelle augmentation des droits sur toute une série de marchandises, avec un développement de plus en plus accentué des principes protectionnistes. En 1890, tous les droits furent majorés de 20 %. Ce mouvement trouva son couronnement dans le tarif ultra-protectionniste de 1890, en vertu duquel les droits de douane sur beaucoup de marchandises subirent, comparativement au tarif de 1868, une majoration allant de 100 à 300 %, et même davantage. Le tarif douanier actuel a été publié en 1903 et sa mise en vigueur date du 16 février 1906. Beaucoup de droits de douane y sont majorés [29].

Il est donc hors de doute qu'il y a tendance générale à défendre les « économies nationales » par de hautes barrières douanières. Le fait que dans toute autre circonstance il peut y avoir réduction des droits de douane, concessions réciproques dans les traités de commerce, ne le contredit nullement. Ce ne sont là que des exceptions, des arrêts temporaires, un armistice dans une guerre incessante. La tendance générale n'en est pas contrariée, car elle n'est pas un simple fait empirique, un phénomène accidentel sans importance essentielle pour les rapports modernes. Bien au contraire, la structure du capitalisme nouveau met précisément en avant cette forme de politique économique. Avec elle, elle apparaît ; avec elle, elle disparaîtra.

Le grand rôle économique que jouent aujourd'hui les droits de douane entraîne une politique agressive du « capitalisme » moderne. Les droits de douane font bénéficier les monopoles d'une plus-value qui leur sert de prime à l'exportation dans la lutte pour les débouchés (dumping). Cette plus-value peut s'accroître de deux façons : premièrement, par un écoulement intérieur plus intensif, avec le même territoire national ; deuxièmement, par l'extension de ce dernier. En ce qui concerne le premier moyen, la pierre d'achoppement est dans la capacité d'absorption du marché intérieur. On ne voit pas la grande bourgeoisie se mettre à augmenter la part de la classe ouvrière et tenter ainsi de se tirer du pétrin à ses propres dépens. Avisée en affaires, elle préfère procéder autrement en élargissant le territoire économique. Moins ce territoire est restreint, plus le profit supplémentaire — toutes conditions égales — est élevé, plus il est facile de paver des primes à l'exportation et de pratiquer le « dumping » plus l'écoulement à l'extérieur est important et plus le taux du profit est accru. Admettons que la part des marchandises exportées soit extrêmen1ent élevée par rapport à l'écoulement intérieur, il est alors impossible de compenser les pertes provoquées par l'avilissement des prix sur le marché extérieur par des prix monopoles sur le marché intérieur. Le « dumping » perd ainsi ses raison. Par contre, un « juste » milieu entre l'écoulement extérieur et l'écoulement intérieur permet de tirer le maximum de profit. Or, cela n'est possible qu'en maintenant le marché intérieur dans certaines limites qui, moyennant une importance égale de la demande, sont déterminées par les dimensions du territoire inclus dans les frontières douanières et, par conséquent, dans les frontières nationales. Si autrefois, à l'époque du libre-échange, il suffisait de faire pénétrer les marchandises sur les marchés étrangers, et si cette occupation économique pouvait satisfaire les capitalistes du pays exportateur, de nos jours, les intérêts du capital financier exigent, avant tout, I'expansion du territoire national, c'est-à-dire dictent une politique de conquête, de pression directe de la force militaire, d'annexion impérialiste. Mais il est évident que là ou, en vertu de conditions historiques particulières, I'ancien système libéral du libre-échange s'est en grande partie main. tenu, où, d'autre part, le territoire national est suffisamment vaste, on voit apparaître, parallèlement à la politique de conquête, une tendance à grouper les parties éparses du corps national, à opérer la fusion des colonies et de la métropole, à former un « empire » économique unique, entouré d'une barrière douanière commune. C'est le cas de l'impérialisme anglais. Et toutes les discussions sur l'organisation d'une union douanière des pays de l'Europe centrale n'ont pas autre chose en vue que la création d'un vaste territoire économique, qui leur conférerait les moyens d'un monopole pour la concurrence sur le marché extérieur. En réalité, c'est là le résultat des intérêts et de l'idéologie du capitalisme financier qui, en s'infiltrant dans tous les pores de l'économie mondiale, crée en même temps une violente tendance à l'isolement des corps nationaux, à la formation d'un système économique se suffisant à lui-même, comme moyen de consolider son monopole. Ainsi, parallèlement à l'internationalisation de l'économie et du capital, il s'opère un processus d'agglomération nationale, de nationalisation du capital, processus gros de conséquences [30].

Ce processus de nationalisation du capital, c'est-à-dire la création de corps économiques homogènes, enfermés dans les frontières nationales et réfractaires les uns aux autres, est également stimulé par les changements intervenus dans les trois grandes sphères de l'économie mondiale : la sphère des débouchés, la sphère des matières premières et la sphère d'investissement des capitaux. Dès lors, nous devons analyser les modifications des conditions de reproduction du capital mondial, en partant de ces trois points de vue.

Notes

[1] Nous ne pouvons nous livrer dans cet ouvrage à une explication détaillée des différences qui existent entre ces formes ; étant donné la tâche que nous nous sommes assignée il suffit de dire que nous ne voyons pas de différence de principe entre le cartel et le trust, celui-ci n'étant pour nous qu'une forme plus centralisée d'un seul et même objet. Toutes tentatives (purement formelles) (v., par ex., Eduard Heilmann : Ueber Individualismus und Solidarismus in der Kapitalistischen Koncentration, Archives Jaffé, t. 39, 36 fascicule) d'établir une différence de principe entre le trust « autocratique » et le syndicat (ou cartel) « démocratique », ne changent en rien le fond des choses qui découle du rôle de ces organisations dans l'eeonomie sociale. Il ne s'ensuit pas, cependant, que rien ne les différencie et de ce point de vue il est bon d'établir cette différence. Or, de toute façon, elle ne consiste pas à opposer un principe « démocratique » à un principe « autocratique ». Voir à ce sujet l'ouvrage de Hilferding : le Capital Financier. En deux mots, cette différence se traduit par le fait que « à l'inverse de la trustisation, la cartellisation n'amène pas la disparition des antagonismes entre les entreprises isolées adhérant au cartel » (HILFERDING : Organisationsmacht und Staatsgewalt, Neue Zeit, 32ème année, t. II, p. 140 et suiv.)

[2] Prof. NAZAREVSKY : Esquisse de l´histoire et de la théorie de l´économie collective capitaliste. Syndicats industriels et entreprises combinées, t. I, 1ère partie « Esquisse de l´histoire de l´unification de l´industrie américaine », Moscou, 1912, p. 318-319.

[3] Ibid, Consulter également Georges Renard et A. A. Dulac : L'évolution industrielle et agricole depuis cent cinquante ans, Paris, 1912, p. 204

[4] I. GOLDSTEIN : Les Syndicats industriels, les Trusts et la Politique économique contemporaine, Moscou, 1912, p. 51.

[5] Eugen von PHILIPPOWICH : Monopole und Monopolpolitik (Grünberg's Archiv für die Geschichte des Sozialismus und der Arbeiterbewegung, 6. année, 1915, 1er fascicule, p. 158).

[6] Dr. TSCHIERSCHKY : Kartell und Trust, Leipzig, 1911, p. 52.

[7] A. RAFFALOVITCH : Les syndicats et les cartels en Allemagne en 1910, (Revue internationale du commerce, de l´industrie et de la banque, numéro du 30 juillet 1911.

[8] Voir Martin SAINT-LEON : Cartels et Trusts, 3 ème édition, Paris 1909, p. 56.

[9] Martin SAINT-LEON, l. c., p. 89 et suiv.

[10] G. LECARPENTIER : Commerce maritime et marine marchande, Paris 1910, p. 165.

[11] Hermann LEVY : Monopoly and Competition, Londres 1911, p. 222-267.

[12] Les données sont tirées de l´ouvrage de L. KAFENHAUS : Les syndicats dans l´industrie métallurgique ; GOLDSTEIN, l .c. ; ZAGORSKY, l. c.

[13] GOLDSTEIN, l. c., p. 5.

[14] NAZAREVSKY, l. c., p. 354 et suiv.

[15] Rudolf HILFERDING : Le Capital financier.

[16] Voir W. SOMBART : Die Deutsche Volkswirtschaft im XIX Jahrhundert, 3 ème éd., Berlin 1913, ch. X ; d´après de récentes informations du Vorwärts, la Diskontogesellschaft a déjà absorbé la Schaffhausenscher Bankverein.

[17] RIESSER : Die deutschen Grossbanken, Annexe VIII, p. 745.

[18] NAZAREVSKY, l. c., p. 362.

[19] PARVUS (« première manière ») ; Der Staat, die Industrie und der Socialismus, p. 77 ; RIESSER, l. c., p. 365.

[20] RIESSER, l. c., p. 501.

[21] NAZAREVSKY, l. c., p. 362.

[22] RIESSER, l. c., p. 501.

[23] V. Willy BAUMGART : Unsere Reichsbank. Ihre Geschichte und ihre Verfassung, Berlin, 1915. L´importance de l´Etat, en tant qu´organisateur de l´industrie, s´est singulièrement accrue pendant la guerre. Nous aurons à en parler plus loin, lorsque nous examinerons l´avenir de l´économie nationale et mondiale.

[24] Friedrich LIST : Gesammelte Schriften, hg. von Ludwig Haüser. 3 Teilen, Stuttgart und Tübingen, 1851. « Das Nationale System der politischen Oekonomie », p. 302-303.

[25] Karl MARX : Le Capital, livre III, p. 118, note d´Engels. Tout cela n´empêche pas H. GRUNZEL de ne pas saisir le sens des phénomènes signalés plus haut. Voir son Handel politik, 4 e édit. « Grundriss der Wirtschaftspolitik », p. 76. Il est juste de reconnaître, cependant, que la différence qui existe entre les droits de douane éducatifs et cartellistes est un lien commun dans la littérature économique politique, depuis Brentano jusqu´à Hilferding. Voir par exemple Joseph HELLAUER : System der Welthandelslehre, t. I, 1910, p. 37 ; TSCHIERSCHKY, l. c., p. 86 et suiv.

[26] Il ne faut pas oublier que lorsque nous parlons de politique etc. des pays, nous sous-entendons la politique des gouvernements et des forces sociales bien définies sur lesquelles s'appuient ces gouvernements. Aujourd'hui il est malheureusement nécessaire de le rappeler encore, étant donné que le « point de vue national étatique qui, scientifiquement est absolument inconsistant » est celui d'hommes dans le genre de Plékhanov et consorts.

[27] ISSAIEV : L'économie mondiale, p. 115-116. Soit dit en passant les « explications » du professeur Issaïev ne laissent pas d'être curieuses. L'élévation des tarifs de 1862 à 1864 s'explique, par exemple, par « les inclinations protectionnistes des hommes qui administraient les finances américaines ». Textuel ! (p. 114-115). Voir également GRUNZEL, l. c.

[28] W. J. ASCHLI : « La conférence impériale britannique de 1907 » (Revue économique internationale, 1907, t. IV, p. 477).

[29] Additions de Kourtchinsky à la brochure déjà citée du professeur Eberg, p. 411. Même M. Kourtchinsky dit de la majoration des droits de douane sur les articles manufacturés allemands que « ce ne fut guère avantageux pour l'économie nationale russe » (p. 412). Ainsi il ne confond pas « économies » avec « employeurs ». Avis à ceux qui « sur leurs vieux jours refont leur éducation ».

[30] Lorsque nous parlons de capital national d'économie nationale, etc., nous entendons partout non pas l'élément national au sens propre du mot, mais l´élément territorial national de la vie économique.

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