1961 |
" A ceux qui crient à « l'Espagne éternelle » devant les milices de la République avec leurs chefs ouvriers élus et leurs titres ronflants, il faut rappeler la Commune de Paris et ses Fédérés, ses officiers-militants élus, ses « Turcos de la Commune », ses « Vengeurs de Flourens », ses « Lascars ». " |
Nous avions dix ans en 1936. Pour nous, la guerre d'Espagne a d'abord été un choc, le spectacle de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants hâves, souvent déguenillés, affamés : les réfugiés espagnols. A travers les propos des adultes nous parvenaient des mots alarmants, chargés d'angoisse : Hitler, les bombardements, la Cinquième colonne, la guerre... Aussi la guerre en elle-même n'a-t-elle pas été pour nous une surprise : nous avions, sinon compris, du moins senti que, simplement, ces foules espagnoles l'avaient vécue avant nous. Plus tard, des camarades espagnols pour qui le combat n'avait jamais cessé nous ont dit la fin de leur espoir ; Franco survivait à l'effondrement des dictatures.
C'est le hasard des mutations universitaires qui nous a fait nous rencontrer au Lycée Condorcet, tous deux attirés depuis des années par la guerre d'Espagne, où l'un de nous voyait la préface oubliée, déformée de la deuxième guerre mondiale, et l'autre une révolution ouvrière et paysanne défigurée, trahie, étranglée. Nous n'étions d'accord que sur la nécessité de travailler et c'est précisément pour cette raison que nous avons entrepris, pendant qu'il était temps encore, d'entendre des survivants, témoins ou acteurs, d'écrire une histoire de la Révolution et de la guerre d'Espagne de 1936 à 1939. Nous avons voulu, contre l'ignorance, l'oubli, la falsification, redonner à cette lutte le visage le plus véridique possible, la dégager de la légende qui l'a précocement ensevelie. Nous avons aujourd'hui conscience que cet objectif, atteint, n'est qu'un premier pas vers la rédaction d'une Histoire plus complète qui nécessiterait des milliers et des milliers de témoignages et surtout de documents d'archives, encore inaccessibles, que ce soit en Espagne même, en France, en Angleterre, en U.R.S.S. ou au Vatican.
Qu'on ne s'attende pas à trouver dans notre ouvrage plus que nous ne voulions, plus que nous ne pouvions y inclure. Les lecteurs à qui nous aurons – nous l'espérons – donné le goût de l'Espagne devront chercher ailleurs, chez les hispanisants, la réponse aux questions qu'ils se poseront en commençant à nous lire. Nous les invitons à aller chercher dans les ouvrages de géographie une minutieuse description de ce pays qui est un monde à part, aussi africain qu'européen. « L'Espagne, dit Joan Maragall, est loin du monde comme une planète à part. Et ses peuples, qui sont dans le monde, paraissent oubliés ». Ils y apprendront que l'Espagne est un « manteau de bure ourlé de dentelles », qu'elle couvre 506 000 km2, que sa population atteint près de 30 millions d'habitants, qu'elle « vit difficilement », que « sa production ne peut suffire qu'à un peuple très sobre », qu'elle « manque de capitaux et de moyens de transport » [1]. S'ils poussent vers les livres d'histoire leurs investigations, ils apprendront que les Anciens situaient en Espagne les Champs-Elysées et que Strabon, le premier géographe, faisait de l'Andalousie la « demeure des Elus », que l'Espagne musulmane, par ses techniques agricoles et artisanales, ses connaissances scientifiques et philosophiques, était à l'avant-garde de la civilisation au Moyen Age. Ils apprendront aussi que les ravages de la Reconquista, cette première épreuve de force entre un monde musulman prospère mais essoufflé et un Occident chrétien barbare mais bouillonnant de vie, n'ont pas empêché l'Espagne de devenir la maîtresse de l'Ancien et du Nouveau Monde : le siècle de Louis XIV, dans tous les livres, vient après celui de la « prépondérance espagnole ». Mais ils retiendront aussi que l'Espagne du Siècle d'Or, comme l'a dit Gaston Roupnel, est à la fois « fontaine d'orgueil et vallée de misère, selon que l'on songe à ses puissants ou à ses foules, à sa Cour ou aux grands territoires douloureux qui vont d'une frontière à l'autre ».
Peut-être alors pénètreront-ils plus facilement dans cette Espagne dont Dominique Aubier et Manuel Tuñon de Lara nous disent qu'elle « recule tandis qu'on l'approche » [2]. Avec eux, ils pourront suivre les itinéraires difficiles vers « l'unité souterraine qui fait le squelette intérieur de l'Espagnol, qu'il soit bavard et Andalou, sévère et Castillan, rusé comme un gallego, intéressé comme un Catalan ou travailleur comme un Basque ». Ils apprendront, en les suivant, les mots « qui font flèche sur la réalité espagnole » : tierra, la terre « qui donne la vie, mais ne l'entretient pas », hambre, que nous traduisons par « faim », mais « qui est à notre faim ce que la rage est à la colère », castizo, médiocrement traduit par « de bonne race », alors qu'il affirme quotidiennement une soif de dignité que proclame toute l'histoire des peuples d'Espagne. Peut-être saisiront-ils aussi, ce qui, plus que tout, échappe à la description et à l'explication, la place que tient la mort dans la vie de l'Espagnol, dont la passion pour les toros lui aura déjà suggéré l'importance. Ils devront pousser plus loin encore leur enquête, pour pénétrer cette profonde spiritualité qui fait se côtoyer la foi la plus fanatique et l'anticléricalisme le plus violent. Il leur faudra apprendre la terre de l'Inquisition, celle de l'autodafé, où l'acte de brûler un homme – Maure mal converti, juif même baptisé, protestant secret ou esprit éclairé – est dit « acte de foi ». Ils devront s'attarder longuement devant Goya et les dessins du Dos de Mayo, méditer sur la violence et la mort de ces hommes aux mains nues face aux fusils des pelotons ou aux sabres des mameluks. Ils n'oublieront pas le soulèvement contre Napoléon de ce peuple qu'il appelait « les gueux » et remarqueront que tandis que les Grands courbaient· l'échine devant le Conquérant, les paysans, dans leurs assemblées de villages, déclaraient la guerre à la Grande Armée et créaient le mot de guerilla. Ils accorderont quelques instants au siège de Saragosse, conquise par les Français, en 52 jours, maison par maison, étage par étage, et à ses 60 000 victimes, femmes et enfants compris, puisqu’ils étaient, eux aussi, combattants. Ils entendront le maréchal Lannes : « Quelle guerre ! Etre obligé de tuer de si braves gens, même s'ils sont fous ! » Car ces « fous » se battaient avec leurs poings et leurs dents. Ils retrouveront cette violence dans les guerres carlistes dans toutes les luttes civiles du XIX°, dans la répression royaliste qui écœura même les « ultras » français venus au nom de la Sainte-Alliance écraser la Révolution espagnole – la première – dans les soulèvements paysans, dans les grèves et la répression, dans la torture et les « exploits » de la garde civile immortalisés par le Romancero de Federico Garcia Lorca.
En découvrant cette Espagne, ils en découvriront des milliers. Ils apprendront que le même mot castillan, pueblo, désigne le peuple et le village, que le village est une petite patrie, la patria chica de M. Brenan, vivant d'une vie propre et presque autonome. Ils suivront mieux alors, par exemple dans les travaux de M. Rama, la difficile construction d'un Etat au-dessus d'une nation inachevée, la vanité et le caractère artificiel de cette tentative « libérale » dans un pays où règnent encore señoritos et caciques. Car les caciques, ces despotes locaux, ne sont pas seulement les traditionnels intendants des grands domaines usant de leur délégation de pouvoir pour assouvir leur goût de puissance et écraser de leur arbitraire et de leur mépris ceux qu'ils emploient et commandent. Le « caciquisme » a pénétré toute la vie sociale et politique; l'administration, les partis, et, dans une certaine mesure, les syndicats, tant il est vrai que ce vice d'une société médiévale peut encore être spontanément secrété par l'Espagne du XX° siècle.
Sans doute, alors, nos lecteurs comprendront-ils mieux certains caractères proprement espagnols de cette révolution et de cette guerre, l'arrogance des seigneurs, sûrs d'incarner une race supérieure, le mépris de la mort et l'acharnement dans la lutte de tous les combattants, leur particularisme et leur attachement à leur ville, leur village, leur terroir – ce qu'on appellera « individualisme », « indiscipline », « tendances anarchistes » –, la violence des fanatismes, la haine, le mépris qui cimente les hiérarchies sociales, mais aussi l'affirmation constante de la dignité, la place tenue, dans l'enjeu de la guerre, par l'idée que chacun des adversaires se fait de l'homme – hombre, une interjection et une affirmation –, qu'ils veuillent l'exalter et le « libérer », ou, au contraire, l'atteindre et le détruire par l'humiliation conçue comme un système.
Les recherches préliminaires autour de notre sujet nous suggéraient bien des itinéraires « hispanisants ». Une camarade espagnole, ancienne déportée en Allemagne, nous proposait de décrire, après une étude scientifique, ce qu'elle avait elle-même entrevu dans sa vie et dans les dossiers des disparus, le long chemin de ces groupes paysans, de leur pueblo au front, en armes, du front en France, désarmés, dans les camps, puis, toujours ensemble, dans les camps de la mort. Il n'est pas douteux que ce serait là une manière parfaitement espagnole d'écrire l'histoire de la Révolution et de la guerre d'Espagne, qu'elle nous aurait menés plus près de la réalité secrète, de l'âme collective du peuple pendant ces années terribles, plus près aussi de la compréhension de ce que fut ce drame pour les millions d'individus qui composent les « masses ».
Pourtant, ce n'est pas la voie « hispanisante » que nous avons choisie. D'abord parce que nous ne sommes pas des hispanisants véritables. Ensuite parce que les préoccupations qui nous ont attachés à ce travail dépassent largement le cadre de la seule Espagne. Nous n'avons pas cherché à tout comprendre, encore moins à tout expliquer, ni Boabdil, ni Avicenne, ni Don Quichotte, ni Torquemada, ni même Ignace de Loyola. Nous avons voulu nous en tenir à des données plus simples peut-être, mais surtout universelles. L'Espagne est l'Espagne, certes, mais aussi un de ces pays qu'on appelait autrefois « arriérés » et qu'on a hypocritement rebaptisés aujourd'hui pays « sous-développés ». Tous les tests que l'économiste moderne applique aux pays pour déceler les caractères du « sous-développement » placent l'Espagne de 1960 comme celle de 1930 dans le groupe des nations les plus nombreuses et les plus pauvres, celles dont on ne peut affirmer sérieusement que leur misère est sans rapport avec l'opulence des autres. Malgré l'incertitude des statistiques espagnoles, il est évident que l'Espagne n'atteint qu'à grand'peine le minimum de 2500 calories par jour et par habitant en moyenne, au-dessous duquel commence la sous-alimentation. La mortalité infantile y reste élevée. L'espérance de vie à un an est de 55 ans, plus qu'aux Indes, bien sûr, mais bien moins qu'en Occident. La natalité reste forte. Le nombre des illettrés est toujours considérable. La proportion de la « population active » ne dépasse pas 37 %, cultivateurs en majorité. La situation d'infériorité des femmes est soulignée par le fait que 9,4 % seulement d'entre elles peuvent être classées parmi la « population active ». Le travail des enfants reste la règle. Les classes moyennes sont numériquement faibles. Le revenu national moyen atteint la moitié de celui des Français avec des écarts bien plus considérables dans l'échelle sociale. Madrid compte, aujourd'hui, selon le professeur Birot, 300 000 domestiques pour 1 800 000 habitants.
Comme dans les autres pays arriérés du monde, les richesses minières et le développement industriel en Espagne sont aux mains de capitalistes étrangers, sauf dans quelques secteurs secondaires. Grands propriétaires terriens et bourgeois d'affaires constituent une mince oligarchie, tout entière tournée vers la défense de ses privilèges. L'Eglise ne semble concevoir d'autre mission que celle que lui assigne le peu religieux Napoléon 1er : faire admettre « l'inégalité des fortunes » et accepter « qu'un homme meure de faim à côté d'un autre qui regorge ». L'enseignement de l'histoire, dans l'Espagne de 1960 comme il y a cent, trente ou vingt ans, consacre cent pages à la contre-réforme et une seule – laquelle ! – à la Révolution française. En somme la révolution et la guerre civile n'ont été qu'un entracte, sanglant et violent. Simplement elles ont provoqué une « grande peur » et rendu plus dur le régime de la classe dominante. La dictature de Primo de Rivera, qui s’exerçait (sous le couvert de la monarchie espagnole) jusqu en 1931 et à la proclamation de la République a été remplacée par une dictature plus absolue. L'expérience républicaine n'a convaincu personne, et le faible Etat, qui n'a pas réussi à réformer l'Espagne ni même à s’organiser sérieusement, a été la première victime des événements de 36. La victoire des militaires lui a enlevé toute chance de ressusciter dans l'immédiat. Dans l'Etat autoritaire, l'armée dicte sa loi, et l'on ne dira jamais assez de quel poids pèsent, dans ces sociétés essentiellement instables, des armées qui ne sont bonnes qu'à la guerre civile et au maintien d'un certain « ordre ».
Ce n'est pas non plus, au XX° siècle, un trait propre à l'Espagne que l'existence d'une masse de paysans sans terre et de paysans pauvres, subsistant à la limite de la disette et qui se jettent d'autant plus facilement dans la lutte qu'ils n'ont rien à perdre et tout à gagner ; non plus que l’existence d’une classe ouvrière encore étroitement liée à la paysannerie, formée surtout de manœuvres et d'ouvriers sans spécialité, dans laquelle il n'y a pratiquement pas d’« aristocratie ouvrière » susceptible de modérer les élans combatifs de cette masse fruste, mais capable de sacrifices. Ce n’est pas seulement en Espagne que ces ouvriers et ces paysans se sont faits les troupes de choc de la révolution que la bourgeoisie s'est refusée à accomplir par crainte des lendemains : le Tiers-Etat du XX° siècle, même baptisé « Front populaire », craque très vite, partout, sous la poussée du « quatrième Etat » des ouvriers et des paysans pauvres, se battant pour leur propre compte. L’Espagne n’est pas non plus le seul pays à avoir manifesté d’éclatante façon la tendance populaire à la démocratie directe. La même volonté d'exercice du pouvoir par le peuple en armes se trouve déjà chez les sans-culottes parisiens de l'an II [3] .
A ceux qui crient à « l'Espagne éternelle » devant les milices de la République avec leurs chefs ouvriers élus et leurs titres ronflants, il faut rappeler la Commune de Paris et ses Fédérés, ses officiers-militants élus, ses « Turcos de la Commune », ses « Vengeurs de Flourens », ses « Lascars ». Car ce n'est pas seulement en Espagne et à Cuba que la Révolution est romantique. Faut-il rappeler que c'est la Russie qui a vu surgir en 1905 les premiers « conseils » – où, comme en Espagne, partis et syndicats, siégeant ès qualités, avaient des représentations égales – et que le mot, en russe, se traduit par soviet ? Faut-il, plus près de nous, évoquer le rôle joué en 1956 par les « Comités révolutionnaires », les « Conseils ouvriers » et le « Conseil ouvrier central », pendant la Révolution hongroise ?
En outre, la révolution et la guerre d'Espagne sont loin d'avoir été une affaire purement espagnole. De près ou de loin, tous les gouvernements y ont participé, intervention et non-intervention s'expliquant par des intérêts immédiats, des préoccupations stratégiques et diplomatiques, mais aussi des intérêts généraux, de ceux qu'on appelle « historiques ». Pas plus qu'hier les affaires du Viet-Nam ou de Corée, aujourd'hui celles de Cuba, du Congo ou d'ailleurs, les affaires d'Espagne ne pouvaient se régler à l’intérieur de ses seules frontières. Ces luttes civiles concernent finalement toutes les puissances et tous les peuples, car elles ne sont que l'aspect particulier, dans un cadre géographique précis, de la crise qui secoue l'humanité au siècle des guerres mondiales.
Jean Jaurès, qui fut, aussi, un historien, avoue qu'il se serait volontiers, pendant la Révolution, assis aux côtés de Robespierre. Suivons-le dans la voie de la franchise. L'historien parfaitement objectif n'est pas encore né et celui qui croit l'être se ment à lui-même comme il ment aux autres. Toutes les précautions dont s'entourent recherche et critique scientifique ne suppriment en définitive ni nos sentiments ni nos réflexes personnels. Pourquoi le cacher? Le choix du sujet lui-même révèle nos tendances profondes. Nous aussi, ayant « vécu » notre sujet, nous avons eu tendance à prendre parti : en esprit du même côté des tranchées, nous divergions pourtant spontanément, l'un plutôt d'accord avec les républicains avancés et les socialistes modérés, soucieux qu’il est d'organisation et d'efficacité, de rapport des forces à l'échelle mondiale, et l'autre avec les communistes dissidents ou les syndicalistes révolutionnaires, parce qu'il pense, avec Saint-Just, que « ceux qui font des révolutions à demi ne font que se creuser un tombeau ». La division du travail entre nous en est la preuve. La révolution proprement dite est l'objet d'une première partie rédigée par Pierre Broué, tandis qu'Emile Témime s'est consacré à la guerre elle-même, ses aspects internationaux, ainsi qu'à la naissance de l'Etat national-syndicaliste. Qu'on n'imagine cependant pas que notre livre résulte d'une juxtaposition de deux exposés sur des thèmes voisins. Nous avons voulu ces deux parties distinctes pour souligner deux des points de vue – les plus importants à nos yeux – d'où l'on peut aborder l'étude du sujet qui fut le nôtre. L'inconvénient majeur de cette méthode est de donner occasion à d'inévitables répétitions que nous avons pourtant le plus possible allégées [4]. L'avantage est que ce double éclairage peut projeter sur les événements une lumière plus indiscrète, en éclairer la complexité sans surcharger l'exposé de remarques et retours en arrière. Pendant les trois années de notre collaboration, nous avons quotidiennement confronté nos points de vue, échangé nos notes et nos fiches, critiqué nos documents et nos interprétations, obligeant « l'autre » à de nouvelles recherches, et, dans la phase finale, à des rédactions successives et enrichissantes. Qu'on ne nous tienne pas rigueur si, étant nous-mêmes nos premiers lecteurs, nous nous croyons en droit d'affirmer que cette collaboration critique, ces critiques parfois vives quoique toujours amicales, sont la preuve de la conviction et du sérieux que nous avons apporté dans notre tâche commune. Nous pensons avoir « fait le point » dans la mesure du moins où cela est possible avec les seules sources imprimées, déjà énormes, qui ont pu être mises à notre disposition. Quelle que soit leur origine, nous avons essayé de les juger en historiens et d'éliminer tout parti pris, d'exposer honnêtement les faits en ne portant qu'un minimum de jugements ; nous espérons avoir ainsi laissé à chacun toute latitude de mettre l'accent sur tel ou tel aspect primordial à ses yeux. C'est pourquoi nous serons heureux de nous voir apporter objections, critiques, témoignages nouveaux, tout ce qui, à travers notre travail et par lui, peut contribuer à la connaissance de la vérité, qui ne peut être, à nos yeux, que le fruit d'une recherche constante.
Il nous reste – et ce n'est pas le moindre de nos devoirs – à remercier tous ceux sans qui cet ouvrage n'aurait pas vu le jour, Jérôme Lindon, directeur des Editions de Minuit, nos amis d'Arguments, Edgar Morin et Kostas Axelos, qui nous ont introduits auprès de lui, et surtout ceux qui sont avec nous co-auteurs, tous les témoins, Espagnols ou non, politiques, écrivains et ouvriers, en Europe et en Amérique, trop nombreux pour être tous cités, qui nous ont répondu, ont fouillé dans leurs mémoires et dans leurs archives, consacré des heures à nos questionnaires, recherché des documents inédits et des témoins disparus. Leur unique souci, malgré la diversité de leurs horizons politiques, a été de nous aider dans l'approche de la vérité. Nous adressons des remerciements particuliers à M. Jordi Arquer, qui a mis à notre disposition sa bibliothèque et sa documentation, uniques sur ce sujet, et nous a aidés de ces conseils. Enfin Jean-Jacques Marie a traduit pour nous des documents en langue russe.
P. B., E. T.
Notes
[1] Géographie de 4°. Cours Varon (A. Colin.)
[2] Espagne, dans la collection Petite Planète.
[3] Voir à ce sujet la thèse d'Albert Soboul : Les sans-culotte parisiens en l'an II, travail d'universitaire venu confirmer l'ouvrage de pionnier de Daniel Guérin : La lutte de classes sous la II° République; Bourgeois et Bras Nus. Ce dernier auteur a développé à nouveau ses idées dans « Jeunesse du socialisme libertaire ».
[4] Pour réintroduire chaque événement dans son cadre chronologique, le lecteur est prié de se reporter au tableau synoptique inséré à la fin de l'ouvrage.