1965 |
"(...) de toute l'histoire antérieure du mouvement ouvrier, des enseignements de toute cette première période des guerres et des révolutions, de 1914 à 1938, analysés scientifiquement, est né le programme de transition sur lequel fut fondée la IV° Internationale. (...) Il est impossible de reconstruire une Internationale révolutionnaire et ses sections sans adopter le programme de fondation de la IV° Internationale comme base programmatique, au sens que lui conférait Trotsky dans la critique du programme de l'I.C. : définissant la stratégie et la tactique de la révolution prolétarienne." |
Défense du trotskysme (1)
Avertissement
C'est dans la perspective de la reconstruction de la IV° Internationale que se situe l'étude de Stéphane Just qui paraît dans ce numéro de « LA VERITE ». Elle constitue l'accomplissement de l'une des tâches, nécessaires à cette étape, dans la voie de la reconstruction de la IV° Internationale : une analyse d'ensemble des positions du centre révisionniste et liquidateur qui a détruit l'Internationale fondée par Léon Trotsky en 1938; un bilan de son activité politique.
L'internationalisme dont se réclame cette revue, nous avons toujours insisté sur ce point, a un contenu politique précis : poursuivre, dans les conditions actuelles, la lutte impulsée par Léon Trotsky pour la IV° Internationale. Ces conditions actuelles, ce ne sont pas seulement celles que crée la disposition présente des forces de classe à l'échelle internationale, l'évolution de la lutte des classes, la crise conjuguée de l'impérialisme et de la bureaucratie. Que cette lutte doive aujourd'hui se présenter comme une lutte pour la reconstruction de la IV° Internationale montre assez que le révisionnisme et son activité constituent un élément objectif dont il faut tenir compte.
Aujourd'hui, la perspective de la reconstruction de la IV° Internationale correspond non seulement à une nécessité historique - ce n'est que par une organisation internationale, du fait du caractère international de la lutte de classe, que peut se construire la direction révolutionnaire - mais aux besoins politiques les plus urgents qui s'expriment à travers la crise du mouvement ouvrier.
Mais ces circonstances favorables n'ont de signification que dans la mesure où elles sont exploitées par les révolutionnaires, Le Comité International, du fait de la lutte politique internationale qu'il a menée comme de l'activité réelle dans la lutte des classes des organisations qui s'en réclament, a pu prendre l'initiative d'organiser, pour le courant de l'année 1966, une conférence internationale des organisations trotskystes affiliées au Comité International. Cette Conférence, qui sera préparée par la plus large discussion politique, ouvrira concrètement la voie à la reconstruction de la IV° Internationale. C'est dans le cadre de cette préparation que se place l'étude de S. Just.
Le centre révisionniste – le prétendu « Secrétariat Unifié de la Quatrième de la Quatrième Internationale » - subit très directement les contre-coups du développement de la lutte des classes internationale, et de la crise conjuguée de l'impérialisme et de la bureaucratie. Il se disloque en fonction même des lignes de clivage qui existent au sein des appareils bureaucratiques. Il lui a fallu « suspendre » son père spirituel, Pablo, ouvertement aligné sur la bureaucratie russe dans le conflit sino-soviétique. Il lui faut interdire toute discussion de fond sur la capitulation ouverte de son « grand parti », le Lanka Sama Samaya Party, de Ceylan. Il lui faut concilier son adaptation à la social-démocratie dans certains pays d'Europe, ses proclamations pro-chinoises et l'opportunisme de plus en plus cyniquement affiché de ses partisans américains.
Le récent coup d'état d'Alger ridiculise ses pompeuses affirmations sur le « gouvernement ouvrier et paysan » de Ben Bella, sur le socialisme en marche en Algérie. En Belgique, exclus par une bureaucratie social-démocrate résolue à démontrer que l'ingratitude est une vertu politique, ses partisans se sont engagés dans l'aventure d'un « parti des travailleurs wallons », avec le concours d'éléments réformistes de droite qui viennent aujourd'hui de briser cette organisation pour fonder un nouveau parti, ouvertement bourgeois !
Est-ce donc bien le moment de consacrer une longue étude à la naissance et au développement du révisionnisme au sein de la IV° Internationale, à sa destruction en tant que totalité politiquement cohérente, par un centre liquidateur, alors que justement, ce centre s'effondre, que les événements le ridiculisent ? Les idées de Pablo, de Frank, de Germain ne sont-elles pas assez discréditées pour qu'il suffise de les reléguer dans un musée des monstruosités théoriques afin de passer aux problèmes posés par la reconstruction de l'Internationale ?
La décomposition du centre révisionniste, loin de diminuer l'importance de la lutte contre lui par le Comité International, exige son intensification. Tout d'abord, le fait que ce centre continue à usurper le nom de la IV° Internationale, à se réclamer du trotskysme, constitue un obstacle important au regroupement autour du programme de la IV° Internationale, du programme de transition, des forces révolutionnaires qui se développent dans la lutte des classes. De plus, ce révisionnisme, qui exprime la permanence de la domination des appareils bureaucratiques sur le mouvement ouvrier, ne se réduit pas à sa forme actuelle : si celle-ci disparaissait, il réapparaîtrait sous des identités diverses.
Enfin et surtout, plus ce centre révisionniste se décompose, plus s'affirme son rôle - pour reprendre l'expression de Just de « flanc-garde » de la bourgeoisie. C'est ce rôle dans la lutte des classes, cette fonction du révisionnisme, qu'il faut démontrer et préciser par une analyse rigoureuse des textes et des faits.
Cet objectif explique le plan suivi par Just. Il ne s'agit pas essentiellement de retracer l'histoire de la lutte qui s'est développée depuis 1950 entre le trotskysme et ses nouveaux adversaires. Il s'agit de montrer, sur toutes les questions essentielles, à la fois l'unité et les formes diverses reprises par le révisionnisme « pabliste ». Aussi l'étude est-elle amenée à traiter des problèmes d'une stratégie révolutionnaire que la lutte contre le révisionnisme a placée ait premier plan. Par là même il s'agit, à travers la polémique, cette forme naturelle d'expression du marxisme, d'un travail théorique et politique de fond.
Après avoir, dans l'introduction, situé la place historique de la IV° Internationale et de son programme, Just souligne dans une première partie les contradictions qui existaient au sein de la IV° Internationale à l'issue de la guerre, et met à nu les racines du révisionnisme dont Pablo devait se faire le défenseur cohérent.
Puis les chapitres suivants examinent les grands thèmes dit révisionnisme : la division du monde en « blocs », substituée à la lutte de classe internationale, « la guerre-révolution », la révision de la théorie marxiste de l'état et de la conception trotskyste de la révolution politique, l'abandon de la théorie de la révolution permanente, le ralliement aux thèses réformistes sur le « néocapitalisme ».
Pour chaque question, la permanence des positions révisionnistes est démontrée en même temps que leur développement et la logique de ce développement sont soigneusement analysées.
Puis, l'altitude des révisionnistes face à la lutte du prolétariat est réexaminée dans son ensemble, à partir de trois exemples : la France, la Belgique et Ceylan.
Enfin, le dernier chapitre pose concrètement les problèmes de la reconstruction de la IV° Internationale.
Pour des marxistes, théorie et pratique sont inséparables. Cela ne signifie pas seulement que la théorie exprime, en la généralisant, l'expérience de la lutte. Cela veut dire que l'activité théorique est une composante indispensable de l'action. L'étude de Stéphane Just, de ce point de vue, constituera une arme précieuse pour l'avant-garde ouvrière.
LA VÉRITÉ.
N.-B. Dans tous les textes cités au cours de cette étude, ce qui est souligné l'est dans le texte, sauf indication expresse du contraire.