1924 |
Source : Souvenirs sur Lénine, 1930, Bureau
d'éditions. |
A propos du passage de Lénine par l'Allemagne
Lorsque les bolchéviks résolurent de passer par l'Allemagne, ils comprenaient fort bien que la bourgeoisie en profiterait pour les représenter comme des traîtres, des vendus.
Néanmoins, la réalité dépassa toutes les prévisions. Après les thèses exposées par Lénine dès son arrivée, thèses dans lesquelles tout se trouvait clairement expliqué, la bourgeoisie sentit qu'une lutte à mort venait de s'engager. Sa rage ne connut plus de bornes. Elle savait qu'elle ne pouvait avoir le dessus en combat déclaré ; aussi, avec l'aide des Alexinsky et de ses semblables, elle résolut d'agir par derrière en répandant l'odieuse calomnie de l'espionnage pour le compte de l'Allemagne. Cette calomnie fit boule de neige et obscurcit l'esprit de la population, et même celui des couches les plus arriérées de la classe ouvrière.
La situation n'était pas gaie pour Vladimir Ilitch, qui se trouvait traqué de tous côtés. Pendant les journées de juillet 1917, il était déjà prêt à aller se remettre entre les mains du gouvernement afin d'essayer, par ce moyen, de sauver son honneur, si inséparablement lié à l'honneur du Parti.... tout en sachant, en voyant que ce n'était pas une issue, mais tout simplement un suicide... il hésita longtemps avant de se décider à se dérober aux poursuites.
Plus tard la calomnie tomba d'elle-même. Non pas que de nouvelles données eussent été produites, ou que ses ennemis eussent renoncé à la calomnie, mais simplement parce que les ouvriers et les paysans crurent à la justesse du point de vue des bolchéviks, à la droiture de Lénine.
Dans son livre, Dix jours qui ébranlèrent le monde, John Reed rapporte un petit fait remarquable. A la gare de Gatchina, les voyageurs d'un train de banlieue entourent une sentinelle et cherchent à la convaincre. « Sais-tu bien, lui dit un monsieur qui vient de se vanter d'être un révolutionnaire, lui aussi, et d'avoir été interné dans une forteresse, sais-tu bien que ton Lénine est un espion allemand ? » Le soldat interloqué lui répond : « Non, je ne le sais pas, je n'ai pas d'instruction, mais ce que je sais, c'est que tout ce que Lénine dit au sujet de la terre est juste. »
Les masses comprirent qu'elles avaient en Lénine un dévoué et ardent défenseur de leurs intérêts et elles cessèrent de croire à la légende de l'espionnage...
Maintenant que l'on rassemble avec tant de soin tout ce qui concerne Lénine, il était également indispensable de réunir tous les documents concernant son passage à travers l'Allemagne.
Ces documents ont été soigneusement recueillis et publiés par un communiste suisse, le camarade Platten, qui rendit, à cette époque, d'immenses services aux bolchéviks.
Ce livre fait toute la lumière nécessaire sur l'histoire du wagon plombé.