1917 |
La «Pravda » n° 75, 20 (7) juin 1917 |
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Lénine Y a-t-il un chemin vers une paix équitable ? |
Y a-t-il un chemin vers une paix sans échange d'annexions (de conquêtes), sans partage de butin entre forbans capitalistes ?
Oui. Par la révolution ouvrière contre les capitalistes de tous les pays.
La Russie est en ce moment le pays le plus proche du début de cette révolution.
Ce n'est qu'en Russie que le passage du pouvoir à des organismes déjà existants, les Soviets, peut s'effectuer d'un seul coup, pacifiquement, sans insurrection, les capitalistes ne pouvant résister aux Soviets des députés ouvriers, soldats et paysans.
Ce passage du pouvoir permettrait de mettre à la raison les capitalistes qui gagnent des milliards sur les fournitures de guerre, de révéler toutes leurs machinations, d'arrêter les millionnaires prévaricateurs, de briser leur toute-puissance.
Ce n'est qu'après le passage du pouvoir aux classes opprimées que la Russie pourrait s'adresser aux classes opprimées des autres pays, non plus avec des mots creux et des appels abstraits, mais en invoquant son propre exemple et en proposant sur l'heure, en termes précis, les conditions bien claires d'une paix générale.
Cette proposition de paix immédiate porterait : Camarades ouvriers et travailleurs de tous les pays ! Assez de sang. La paix est possible. Une paix équitable est une paix sans annexions, sans conquêtes. Que les forbans capitalistes allemands et leur bandit couronné Guillaume sachent que nous ne traiterons pas avec eux et que nous considérons comme conquêtes non seulement ce qu'ils ont pillé depuis la guerre, mais aussi l'Alsace et la Lorraine, et aussi les territoires danois et polonais de la Prusse.
Nous considérons comme conquêtes des tsars et des capitalistes russes la Pologne, la Finlande, l'Ukraine et les antres pays non grands-russes.
Nous considérons comme conquêtes des capitalistes anglais, français et autres toutes leurs colonies, l'Irlande, etc.
Nous, ouvriers et paysans russes, nous ne garderons par la force aucun des territoires non grands-russes, aucune des colonies russes (tels le Turkestan, la Mongolie, la Perse). A bas la guerre pour le partage des colonies, pour le partage des annexions, pour le partage du butin des capitalistes !
L'exemple des ouvriers russes sera inévitablement suivi, peut-être pas dès demain (les révolutions ne se font pas sur commande), mais inévitablement, par les ouvriers et les travailleurs de deux grands pays au moins : l'Allemagne et la France.
Car ces deux pays succombent, le premier à la famine, le second aux pertes en vies humaines. Tous deux concluront la paix à nos justes conditions, à l'encontre de leurs gouvernements capitalistes.
Le chemin de la paix s'ouvre devant nous.
Si les capitalistes anglais, japonais, américains, tentaient de s'opposer à cette paix, les classes opprimées de la Russie et des autres pays ne reculeraient pas devant une guerre révolutionnaire contre les capitalistes. Et, dans une telle guerre, elles ne vaincraient pas seulement les capitalistes de trois pays éloignés de la Russie et absorbés par leurs propres rivalités, elles vaincraient aussi les capitalistes du monde entier.
Le chemin d'une paix équitable s'ouvre devant nous. Ne craignons pas de nous y engager.