Source : numéro 13 du Bulletin communiste (deuxième
année), 31 mars 1921, précédé de l'introduction suivante : |
Notre attitude envers la guerre se définit entièrement par l'internationalisme, par nos appréciations sur les questions politiques, sociales et économiques, par notre lutte, par nos méthodes, par notre but.
La défense d'un pays est, en effet, conditionnée par la lutte des classes révolutionnaires dans chaque pays envisagé séparément, et par l'action commune du prolétariat de tous les pays agissant sous ce mot d'ordre : substituer la lutte des classes ouvrières à la guerre impérialiste, la lutte des classes internationales aux guerres nationales.
Le but de notre guerre à la guerre est international ; c'est à l'échelle internationale que nous nous efforçons d'apprécier et de prévoir le résultat des conflits : leur signification générale pour le prolétariat du monde entier, voilà ce qui nous intéresse et c'est au prolétariat du monde entier que nous voulons préparer pour demain un terrain favorable. La lutte des classes internationale contre la guerre ne doit pas se poursuivre séparément dans chaque pays, selon un schéma approximatif invariable, que l'on s'appliquerait à réaliser aveuglément, obstinément, elle doit être un processus vital, unique dans le monde entier, étendu à tous les pays où le capital et le travail sont en présence.
Nous en suivons le développement dans tout l'univers et nous réagissons à toutes ses phases. Dans tous les pays et dans chaque pays considéré séparément, nous conformons nos méthodes d'action au principe internationaliste, afin d'obtenir le plus grand résultat, c'est-à-dire le développement maximum de la puissance révolutionnaire du prolétariat, considéré comme formant un tout unique.
Il s'agit de toujours diriger opportunément et au bon endroit les grands mouvements sociaux, connexes à la guerre, vers le socialisme international, par l'action directe des masses prolétariennes. Selon les perspectives et les possibilités révolutionnaires de chaque pays et de chaque moment, il s'agit d'intervenir tantôt résolument, tantôt prudemment et de déployer une activité révolutionnaire plus ou moins énergique ou circonspecte. L'indispensable, c'est de tendre tous nos efforts, en vue de réaliser la plus grande coordination de l'action révolutionnaire et socialiste internationale, en tenant compte à la fois des circonstances particulières dans chaque pays et de lu situation d'ensemble. Il s'agit de déployer la plus grande énergie dans toutes les questions fondamentales, à tous les moments décisifs. C'est pourquoi, dès le début de la guerre mondiale, et jusqu'à l'heure actuelle, la plus haute tension des forces révolutionnaires contre la guerre et contre le gouvernement a été et continue d'être le devoir révolutionnaire en Allemagne, plus que partout ailleurs. C'est, en Allemagne, le premier devoir et le plus sacré. Car nous portons la plus grande responsabilité pour tout le mal que la guerre mondiale a fait à l'Internationale, au prolétariat et au socialisme. C'est pourquoi la faute historique de la majorité allemande est si grande ; c'est ce qui fait l'infamie de sa coalition avec le gouvernement des Hohenzollern : c'est pourquoi elle mérite d'être traitée par l'histoire, beaucoup plus sévèrement que les socialistes gouvernementaux de tout autre pays.
Si les puissances centrales réussissaient à terminer la guerre dans la situation militaire actuelle, ce serait une catastrophe pour le peuple allemand, un malheur pour le monde, une cause permanente de conflits, et certainement la cause d'une nouvelle guerre, qui ne pourrait manquer d'éclater à brève échéance. La victoire des empires centraux serait, par suite de l'impuissance de la. Russie, une victoire de l'impérialisme, c'est-à-dire de la violence politique et de l'oppression sociale remportée avec le concours de la révolution russe, du prolétariat russe. Ce serait ainsi un coup terrible porté à l'influence du socialisme, en un mot la plus grande défaite du prolétariat dans sa lutte pour l'émancipation.
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