1930

Face à la stabilisation de la bureaucratie stalinienne, construire et souder une force fidèle au bolchévisme.


Œuvres - décembre 1930

Léon Trotsky

Lettre à F. Pfemfert

27 décembre 1930

Cher camarade Pfemfert,

Votre nouvelle concernant la délivrance imminente d'un visa serait pour nous tous ici des plus réjouissantes si elle correspondait à la réalité. Mais c'est une fausse nouvelle, car la réponse des autorités à O(scar) C(ohn) n'est rien d'autre que l'attitude typiquement hypocrite des policiers républicains wilhelminiens qui consiste non seulement à ne pas laisser entrer la personne concernée, mais, de plus à la lanterner le plus longtemps possible. Aucun Etat ne délivre un visa conditionnel pour un avenir indéterminé. Les services turcs concernés répondront poliment: nous vous laisserons évidement entrer mais vous devez vous procurer le visa auprès des autorités compétentes à Berlin. Telle est bien la règle générale. Les autorités allemandes le savent aussi bien que moi. C'est de la même façon qu'ils se sont moqués des mois durant de Myasnikov. Telle est, semble-t-il, la façon d'agir spécifiquement allemande, en matière de visas.

Je pourrais par exemple écrire au Premier Ministre turc pour lui demander d'assurer à mon fils la possibilité de revenir en Turquie. Telle fut d'ailleurs ma première réaction à la réception de votre lettre. Puis j'ai réfléchi et me suis dit: un ministre recevant une telle demande doit nécessairement en venir à soupçonner que mon fils veut entreprendre à Berlin une action contre la Turquie et que je veux lui assurer à l'avance une possibilité de retour. Car, s'il n'y avait rien de suspect dans ce projet de voyage, je n'aurais pas besoin de m'adresser au Ministre pour lui demander d'accorder un visa, alors que les autorités turques ne l'ont jamais refusé à personne, au moins pour Constantinople. Ce souci apparaîtrait d'autant plus suspect de la part d'un membre de la famille résidant à Constantinople. De même que ma fille vient d'obtenir un visa turc à Moscou sans la moindre difficulté, de même mon fils l'aurait obtenu à Berlin. Mais il est difficile de transformer le service turc des visas en bureau d'assurance contre toutes les vicissitudes de la vie de mon fils et si les autorités allemandes exigent cela, c'est bien parce qu'elles sont assurées que, du point de vue juridique et policier, cette condition est parfaitement irréalisable. Je vous prie de transmettre ces réflexions à Me Cohn, en l'assurant de tous mes remerciements pour ses efforts.

Un télégramme vient de vous être adressé pour vous informer de ma grippe qui, me semble-t-il, tire à sa fin, car aujourd'hui fut le premier jour sans fièvre. J'espère que votre température s'est, elle aussi, entre-temps, rapprochée de la normale.

Comme mon éditeur américain a changé d'avis à propos des délais de parution de l'Histoire de la Révolution, j'ai du écrire à Fischer à ce sujet et par la même occasion, je lui ai fait part de mes nouveaux travaux.

J'ai reçu avec plaisir le numéro de Zviezda , la revue russe contenant l'article sur Vorovsky. Malheureusement, les extraits de la biographie étaient très insuffisants. Ne pourrait-on se procurer à Berlin la brochure de Bontch-Brouévitch sur Vorovsky. Ainsi que les articles de critique littéraire de Vorovsky, qui ont été publiés en un volume ?

La grippe qui sévit à la maison nous a contraints à reporter la révision de la traduction . Nous rattraperons cela dans les jours qui viennent. Il nous manque encore le chapitre "Prolétariat et paysannerie".


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