1949 |
L'émancipation des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs eux-mêmes (Marx) |
BULLETIN du S.D.R. n° 36
13 juin 1949
Contrairement à M. Lefaucheux qui craint la polémique, parce qu'il a des choses à cacher, nous, nous aimons la polémique, parce que nous n'avons rien à cacher. Seule, la polémique permet de démasquer l'hypocrisie, la fraude et le bourrage de crâne sous toutes ses formes.
Si vous demandez à un exploiteur, farci de principes moraux et de préceptes religieux, comment il concilie une exploitation féroce des travailleurs avec sa bonté d'âme, il trouvera toujours un principe "supérieur" en vertu duquel le grand nombre doit peiner et souffrir dans cette vallée de larmes, tandis que lui et sa classe jouissent de toutes les conquêtes de l'humanité.
Jusqu'à récemment, pour M. Lefaucheux, le principe qui justifiait l'exploitation des travailleurs de la Régie, c'était que leurs efforts, ne profitant plus aux capitalistes privés mais à l'Etat, étaient pur profit pour la nation tout entière. Mais, dans son bulletin de Juin 49, nous entendons un nouveau son de cloche. M. Lefaucheux y explique qu'il n'eût pas été malin de "faire apparaître un bénéfice plus considérable" qu'il ne l'a fait car, dans ce cas, on commettait la double faute d'augmenter la somme versée à l'Etat sous forme d'impôt et de compromettre la trésorerie" (de la Régie).
Premier aveu : donner à l'Etat-patron, ce n'est pas donner à la nation, puisque le très national M. Lefaucheux n'hésite pas à le frustrer d'une part importante d'impôts.
Deuxième aveu : le très moral M. Lefaucheux peut faire apparaître et disparaître le montant des bénéfices par un simple jeu d'écriture, en les dissimulant sous forme "de réserves et d'investissements" ; ce qui n'est jamais le cas d'un pauvre bougre qui voudrait bien, pour payer moins d'impôts, investir tout son salaire en nourriture, habillement et autres objets de première nécessité.
Le Comité d'Entreprise a suivi M. Lefaucheux sur ce terrain. Cela a pour but, paraît-il, de "combattre la crise commerciale qui commence", en augmentant les moyens de la Régie. Si on n'a pas distribué davantage de "bénéfices aux travailleurs", c'est tout simplement pour les assurer contre le chômage à venir ! M. Lefaucheux prend les ouvriers pour des enfants - il le dit, du reste, au début de son article.
Mais quel est l'enfant qui puisse ignorer qu'en cas de crise, quels que soient les moyens de la Régie, un grand nombre de travailleurs seront jetés sur le pavé et réduits à l'allocation de chômage.
L'augmentation des moyens de la Régie ne profitera qu'aux obligataires et autres Lefaucheux.
Marquons le point :
M. Lefaucheux et le Comité d'Entreprise jouent double jeu en invoquant, d'une part, la "nationalisation" de la Régie pour nous imposer des sacrifices, et en se vantant, d'autre part, d'avoir "roulé" l'Etat pour justifier les 7 milliards engloutis par la Régie en regard des 450 millions distribués aux travailleurs sous la pression de l'action syndicale.
Et les travailleurs enregistreront la menace : soyez sages, le chômage vous guette !
Avec le S.D.R., ils lutteront pour le retour aux 40 h et l'échelle mobile des heures de travail, avec maintien du salaire normal.
Seule l'action des ouvriers peut imposer que les milliards "mis à gauche" par la Direction soient employés pour les garantir contre le chômage. Le chômage étant provoqué par le grand capital pour maintenir ses profits et surprofits, il est normal que ces derniers servent à empêcher l'affamement des travailleurs.
La rédaction