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Au camarade Loriot

et à tous les amis français qui ont adhéré à la III° Internationale

Lénine

28 octobre 1919

Cher ami,

Je vous remercie du fond du cœur de votre lettre, qui nous est d'autant plus précieuse que nous avons trop rarement de vos nouvelles.

En France, comme en Angleterre, l'impérialisme victorieux a offert non seulement à un certain nombre de petits bourgeois la possibilité de s'enrichir, mais il pourra aussi accorder à la couche supérieure des ouvriers, à cette aristocratie ouvrière, des "aumônes", la soudoyer, l'intéresser en la faisant participer à la distribution de miettes du butin impérialiste récolté en pillant les colonies, etc.

Mais la crise provoquée par la guerre est si grande que, même dans les pays victorieux, la masse des travailleurs est inévitablement condamnée à une misère noire. Depuis le printemps dernier on constate une progression rapide du communisme et une sympathie accrue envers le pouvoir des Soviets et la III° Internationale. Vous devez donc persévérer encore et toujours dans la lutte, tout particulièrement contre les opportunistes très raffinés comme Longuet. Les parlementaires et politiciens "expérimentés" essaieront bien des fois encore de s'en tirer en reconnaissant verbalement la tactique révolutionnaire et la dictature du prolétariat, mais en cherchant à duper le prolétariat par de nouveaux subterfuges, comme Longuet, Merrheim et compagnie l'ont fait en ce qui concerne le 21 juillet [1]. Ils poursuivront leur vieille politique opportuniste qui consiste à gêner et compromettre la révolution de toutes les manières possibles. En France et en Angleterre les vieux chefs ouvriers pourris feront des milliers de tentatives semblables.

Mais nous sommes tous convaincus que les communistes qui militent en liaison intime avec les masses prolétariennes parviendront à briser ces tentatives et à les surmonter. Plus les communistes agiront avec fermeté et résolution, plus vite ils remporteront une victoire totale.

Salutations communistes

Lénine

Notes

[1] Grève internationale du 21 juillet 1919 de soutien aux révolutions russe et hongroise que la CGT française décida d'ajourner au dernier moment.