Source : numéro 13 du Bulletin communiste (deuxième
année), 31 mars 1921, précédé de l'introduction suivante : |
La signification tactique du jeu des gens à la Scheidemann et de von Kühlmann2 est claire : « offensive de paix » pour l'usage externe ; mais tout au premier plan — usage interne — l'important, c'est de détourner l'attention des masses à ce moment critique et de les amuser avec la farce tragique des victoires. Bref, 12e variation sur le thème de Bethmann3. Il va de soi que les classes dirigeantes sont divisées par des antagonismes graves qui les amènent, dans les circonstances actuelles, à des conflits très sérieux ; mais, vis-a-vis du prolétariat ces antagonismes, ces conflits, n'ont pas plus d'importance qu'un jeu, pour lesquels les rôles sont répartis à l'avance et qui ne constitue qu'une phase du cours dialectique des événements. Certes, les fautes de von Kühlmann, pour autant qu'on peut les prévoir, seront à la fois très dangereuses pour le gouvernement et pour la majorité. Ou bien nos personnages se sont-ils tellement avancés qu'ils veulent maintenant passer l'Achéron, afin de se contraindre à terminer la partie ? La chose nous paraît peu probable et ne doit aucunement influer sur notre tactique.
Notes
1 Référence au Conte du tonneau de Jonathan Swift. « Les marins ont une coutume : quand ils croisent une baleine, ils lui jettent un tonneau vide, pour l'amuser, pour la distraire d'attaquer violemment le bateau. »
2 Richard von Kühlmann (1873-1948), diplomate et industriel allemand, était le représentant allemand à la conférence de Brest-Litovsk qui avait dicté avec Czernin (Autriche) les conditions draconiennes que le gouvernement soviétique avait du accepter pour obtenir la paix. A l'été 1918 il s'efforce de conclure un armistice, mais doit démissionner.
3Theobald von Bethmann-Hollweg (1856-1921), chancelier du Reich allemand de 1909 à 1917.
|