1935

Ce texte n'a jamais paru sous la signature de son véritable auteur. Il s'agit en effet de l'intervention faite au comité confédéral national de la C.G.T. des 18‑19 mars 1935 par le délégué de l'union départementale des syndicats confédérés de l'Isère, Alexis Bardin. Ce dernier ‑ membre du Groupe Bolchévik-Léniniste, plus tard du Parti Ouvrier internationaliste ‑, avait mandat de son U.D. pour intervenir au C. C. N. C'est Trotsky, à cette époque en résidence à Domène, près de Grenoble, qui rédigea intégralement l'intervention de son jeune camarade.
Ce texte présente donc un double intérêt : d'abord, il traite d'un problème important à cette date en des termes qui demeurent largement d'actualité aujourd'hui. Ensuite il offre un intérêt pédagogique : par cet exercice de style, Trotsky, dont on sait qu'il était par ailleurs capable d'écrire de terribles pamphlets comme de flamboyantes proclamations, montre comment, selon lui, un militant révolutionnaire ‑ Bardin l'était et ne s'en cachait pas – doit  s'adresser à un auditoire de responsables réformistes et, sans renoncer à ses idées quant au fond, chercher le ton juste capable de le faire écouter et de l'aider à convaincre. Ce texte a paru dans la Vérité, n° 233, du 5 avril 1935, et en brochure (La Brèche syndicale, 1935).


Œuvres - avril 1935

Léon Trotsky

Du plan de la C.G.T. à la conquête du pouvoir

5 avril 1935


 

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Camarades,

  La C.G.T. se donne pour but l' « intensification de la propa­gande » en faveur du Plan [1]. Nous ne pouvons que nous en féli­citer. Le meilleur Plan n'est qu'un chiffon de papier s'il n'a pas de masses militantes derrière lui. Il est à regretter que dans l'année écoulée depuis l'adoption du Plan, on ait fait si peu pour le présenter aux masses et pour gagner celles‑ci.

  Les notes « à l'usage des propagandistes » que nous avons reçues de la C.G.T. depuis des mois insistent sur la nécessité d'un « vigoureux effort de propagande orale poursuivi jusque dans les petits centres ». Je suis sûr que les unions départementales pourraient mobiliser des cadres suffisants de propagandistes dévoués mais, pour que leurs efforts soient vraiment vigoureux et surtout efficaces, il faut qu'elles-­mêmes voient clair dans la question. Je dois cependant avouer que les discussions sur le Plan, même dans des cercles assez restreints, révèlent une certaine confusion. Peut-être ne sommes‑nous pas suffisamment renseignés, nous autres, gens de province. Alors, le centre doit nous aider. Je veux, pour ma part, profiter de la session du C.C.N. pour poser des questions, exposer quelques doutes, indiquer quelques lacunes et exiger quelques éclaircissements supplémentaires.

Dans cette salle, il y a beaucoup de camarades qui sont trop expérimentés dans la conduite des masses ‑ beaucoup plus encore que moi ‑ pour que je doive insister sur l'idée suivant laquelle la propagande ne peut porter que lorsqu'elle est claire et concrète ; c'est pourquoi nous, propagandistes, nous vous demanderons un peu plus de clarté et un peu plus de précision sur le Plan.

Le but du Plan.

Dans les différents exposés de la C.G.T., nous lisons souvent qu'il s'agit de rénovation de l'économie nationale, parfois opposée à la « réorganisation économique et sociale », mais parfois aussi identifiée à celle‑ci.

Camarades, il est bien difficile de dire aux ouvriers, aux paysans : « Nous voulons la rénovation de l'économie nationale », alors que tout le monde se sert maintenant de la même expression : les jeunesses patriotes, les démocrates populaires, le Front paysan [2], parfois même les radicaux, mais surtout M. Flandin, proclament et promettent tous la rénovation et même la réorganisation de l'économie nationale. Il faut que notre Plan se distingue de ceux de l'ennemi de classe par la définition précise de son but. Toutes les rénovations et réorganisations dont je viens de parler veulent rester sur la base capitaliste, c'est‑à‑dire sauvegarder la propriété privée des moyens de production. Et le plan de la C.G.T. ? S'agit‑il de rénover l'économie capitaliste ou de la remplacer par une autre ? J'avoue ne pas avoir trouvé une réponse exacte à cette question. Parfois nous lisons dans les mêmes exposés qu'il s'agit non pas d'une transformation du régime actuel, mais seulement de mesures d'urgence pour pallier la crise. Cependant, nous trouvons aussi cette affirmation que les mesures d'urgence doivent ouvrir la voie à des transformations plus profondes.

Peut‑être que tout cela est juste, mais on ne trouve jamais la définition exacte du régime auquel on veut aboutir. De quel ordre doivent être les transformations dites profondes ? S'agit‑il seulement ‑ je ne parle qu'hypothétiquement ‑ de transformer une partie du capitalisme privé en capitalisme d'État ? Ou bien vouIons‑nous remplacer le capitalisme tout entier par un autre régime social ? Lequel ? Quel est notre but final ? C'est étonnant, camarades, mais tous les exposés et même les « notes à l'usage des propagandistes » n'en disent absolument rien. Voulons‑nous remplacer le capitalisme par le socialisme, par le communisme ou par l'anarchie proudhonienne ? Ou bien voulons‑nous tout simplement rajeunir le capitalisme en le réformant et en le modernisant ? Quand je veux me déplacer pour une ou deux stations seulement, je dois savoir où va le train. Même pour des mesures d'urgence, nous avons besoin d'une orientation générale. Quel est l'idéal social de la C.G.T. ? Est‑ce le socialisme ? Oui ou non ? Il faut qu'on nous le dise, sinon, comme propagandistes, nous restons tout à fait désarmés devant la masse.

L'anarchie du socialisme.

Les difficultés ne font que s'aggraver par le fait que nous ne connaissons la doctrine de la C.G.T. et son programme que partiellement et que les « notes à l'usage des propagandistes » ne nous indiquent pas la littérature qui pourrait nous renseigner. La seule autorité doctrinale citée par les exposés de la C.G.T., c'est Proudhon, le théoricien de l'anarchie. C'est lui qui a dit que l' « atelier doit remplacer le gouvernement ». Aspirons‑nous, nous aussi, à l'anarchie ? Voulons‑nous remplacer l'anarchie capitaliste par l'anarchie toute pure ? Il semble que non, puisque le Plan parle de nationalisation des industries‑clés. Nationalisation signifie pratiquement étatisation. Or, si nous avons recours à l'État pour centraliser et diriger l'économie, comment pouvons‑nous invoquer Proudhon qui réclamait de l’État une seule chose : qu'il lui fiche la paix ! Et vraiment l'industrie moderne, les trusts, les cartels, les consortiums, les banques, tout cela dépasse totalement la vision proudhonienne des échanges équitables entre des producteurs indépendants. Pourquoi donc invoquer Proudhon ? Cela ne peut qu'aggraver le désarroi.

Au capitalisme actuel, qui se survit depuis longtemps, nous ne pouvons opposer que le socialisme. Comme propagandiste de notre organisation syndicale, je crois exprimer l'idée de beaucoup de militants en demandant que le Plan de rénovation économique soit dénommé le Plan des mesures transitoires du capitalisme au socialisme [3].

Alors, avant de prendre place dans le wagon, chaque ouvrier, chaque paysan saura où va le train de la C.G.T.

Camarades, pour l'efficacité de notre propagande, cette précision est absolument indispensable.

Les propositions du Plan.

Le plan de la C.G.T. insiste surtout sur ce fait que le crédit est le levier dirigeant de l'économie. Camarades, je suis loin d'être un spécialiste dans les questions de banque et de crédit. Je veux surtout m'instruire pour, pouvoir exposer la question aux ouvriers, mais j'avoue de nouveau ne pas avoir trouvé dans les documents de la C.G.T. les éclaircissements dont j'ai besoin. On y parle de la « nationalisation du crédit » et du « contrôle des banques », c'est plutôt par exception qu'on parle, dans le même texte, de la « nationalisation des banques ». Est‑ce qu'on peut diriger le crédit sans avoir nationalisé les banques ? On ne peut diriger que ce qu'on tient fermement dans ses mains. Voulons-­nous nationaliser les banques, ou non ? Voulons‑nous exproprier les banquiers, oui ou non ? je suppose que oui. Alors, il faut le dire ouvertement et clairement. Malheureusement, au lieu de le faire, nous trouvons des formules vagues, par exemple : « La banque doit être au service de l'économie et non l'économie au service de la banque » (page 6 de l'exposé). Un ouvrier m'a demandé de lui expliquer cette phrase nébuleuse. Voyant ma perplexité, il a remarqué : « Mais la banque reste toujours au service de l'économie, comme les trusts, les compagnies de chemin de fer, etc... Ils sont tous au service de l'économie capitaliste pour dépouiller le peuple. » Cette remarque brutale me parait beaucoup plus juste que la formule que j'ai citée plus haut. La banque capitaliste est au service de l'économie capitaliste. Il faudrait donc dire : nous voulons maintenant arracher la banque des mains des exploiteurs capitalistes pour en faire un levier de la transformation sociale, c'est‑à‑dire de l'édification socialiste. Je voudrais bien voir cette formule claire dans le texte du Plan.

La nationalisation des banques ne pourrait naturellement s'effectuer qu'au détriment de la haute finance. Quant aux petits épargnants, leurs intérêts doivent être non seulement ménagés, mais protégés. Il faut choisir entre les intérêts des requins de la finance et les intérêts des classes moyennes. Notre choix est fait, par l'expropriation des premiers. Nous créerons pour les seconds des conditions beaucoup plus favorables qu'actuellement.

Mais la nationalisation des banques ne suffit pas. Après la nationalisation des banques, il faudra venir à leur unification complète. Toutes les banques particulières doivent être transformées en filiales de la banque nationale. Il n'y a que cette unification qui puisse transformer le système des banques nationalisées en un système de comptabilité et de direction de l'économie nationale.

Contre la dictature du capital financier.

Dans les « Notes à l'usage des propagandistes », je trouve des données extrêmement précieuses concernant l'organisation de la dictature du capital financier sur notre pays. Se fondant sur une enquête faite en 1932, les notes affirment ce qui suit : « Pratiquement, on peut dire que quatre‑vingt‑dix personnes contrôlent et dirigent l'économie de notre pays. » Voilà une affirmation précise, et écrasante dans sa précision. Ainsi, le bien‑être ou la misère de cent millions d'êtres humains ‑ car il ne faut pas oublier nos malheureuses colonies, saignées plus encore que la métropole par les quatre‑vingt‑dix requins ‑, le sort de cent millions de personnes dépend d'un signe des doigts de quatre‑vingt‑dix magnats tout‑puissants. Ce sont eux qui introduisent le gâchis dans l'économie nationale pour conserver leurs privilèges et leur puissance basés sur la misère et sur le sang. Malheureusement, ni l'exposé du Plan, ni les commentaires n'indiquent ce qu'il faut faire de ces quatre‑vingt‑dix monarques qui nous dirigent. La réponse devrait être nette : il faut les exproprier, il faut les détrôner, il faut rendre au peuple spolié ce qui lui appartient. Ce serait un bon commencement pour la réalisation du Plan. je propose, au nom de l'union départementale de l'Isère, d'inscrire cette mesure dans le texte du Plan. Notre propagande deviendra alors beaucoup plus vigoureuse et beaucoup plus efficace [4].

La nationalisation de l'industrie.

Dans l'exposé du Plan, nous trouvons un paragraphe important sous le titre : « Les Nationalisations industrialisées. » Ce titre paraît bien étrange. On comprend ce que signifie l'industrie nationalisée, mais on reste tout à fait surpris devant la nationalisation industrialisée. Permettez‑moi de dire que de pareils artifices de terminologie compliquent la tâche du propagandiste, en obscurcissant les choses les plus simples. Les « Notes à l'usage des propagandistes » ne font même pas mention de la nationalisation de l'industrie. Peut‑être que ces notes précédaient la dernière rédaction de l'exposé. Malheureusement, on ne trouve presque jamais de dates sur les documents de la C.G.T. : c'est une lacune importante qu'il faut combler pour faciliter notre travail.

Nous nous félicitons en tout cas du fait que la dernière rédaction du Plan pose la thèse suivante : La nationalisation de certaines industries‑clés est nécessaire. Cependant, le mot « certaines » parait superflu. Nous ne pouvons pas, naturellement, prétendre nationaliser d'un seul coup toutes les industries, les petites, les moyennes, les grandes. Au contraire, pour les petits industriels, pour les artisans comme pour les petits commerçants et les paysans, le régime que nous voulons établir doit comporter la plus grande indulgence. Mais le texte parle explicitement des industries-clés, c'est‑à‑dire des trusts et des cartels puissants, des congrégations comme le Comité des forges, le Comité des houillères, les Compagnies de chemin de fer, etc., etc. En tant qu'industries‑clés, il faut les nationaliser toutes, et pas « certaines » seulement. Il nous semble même, dans l'Isère, qu'il faudrait joindre au Plan la liste de ces industries‑clés avec des données précises sur leur capital, leurs dividendes, le nombre des ouvriers qu'elles exploitent et le nombre de chômeurs qu'elles vouent à la misère.

Pour parler au peuple, il faut être concret, il faut nommer les choses par leur nom et donner des chiffres exacts, sinon l'ouvrier et surtout le paysan diront : « Ce n'est pas un plan, mais plutôt le rêve platonique d'un bureau quelconque. »

Conditions d'acquisition.

C'est sous ce titre que l'exposé du Plan parle des conditions de la nationalisation des industries‑clés et évidemment aussi des banques. Nous sommes habitués à penser que la nationalisation doit se faire au moyen d'expropriations effectuées contre les exploiteurs. Pourtant le Plan parle, non pas de l'expropriation, mais de l'acquisition. Est‑ce que cela signifie que l'État doit tout simplement acheter aux capitalistes les entreprises créées par le travail des ouvriers ? Il s'avère que oui. A quel prix ? L'exposé nous répond : le prix doit être calculé « sur la valeur réelle au moment du rachat ». Nous apprenons par la suite que « l'amortissement doit être calculé sur une période de quarante ou cinquante ans ». Voilà, camarades, une combinaison financière qui ne sourirait guère ni aux ouvriers ni aux paysans. Comment ? Nous voulons transformer la société et nous commençons par la reconnaissance totale et intégrale de la sacro‑sainte propriété capitaliste !

C'est juste ce que le président du Conseil, M. Flandin, a dit récemment au Parlement : « Le capital, c'est du travail accumulé. » Et tous les capitalistes du Parlement ont applaudi à cette formule. Malheureusement, elle n'est pas complète. Il faudrait dire en vérité : « Le capital, c'est du travail d'ouvriers accumulé par leur exploiteur. » C'est ici le moment de citer Proudhon sur la propriété capitaliste. Vous connaissez la formule « La propriété, c'est le vol. » On pourrait dire dans ce sens « La propriété des quatre‑vingt‑dix magnats qui dirigeaient la France, c'est du vol accumulé. » Non, nous ne voulons pas racheter ce qu'on a volé au peuple travailleur, nous ne voulons pas endetter le nouveau régime dès le premier jour, alors qu'il aura bien des tâches à résoudre et bien des difficultés à surmonter. Le capitalisme a fait faillite. Il a ruiné la nation. Les dettes des capitalistes envers le peuple dépassent de beaucoup la valeur réelle de leurs entreprises. Non ! Pas de rachat ! Pas de nouvel esclavage ! L'expropriation pure et simple ou, si vous voulez, la confiscation.

J'espère bien que dans cette assemblée qui représente les opprimés, les exploités, personne n'est animé de sympathie pour les magnats menacés de chômage et de misère. Ils sont d'ailleurs assez prévoyants pour s'assurer de tous côtés et, si vraiment l'un d'entre eux se trouvait sans ressources, l'État lui assurerait la même pension qu'aux ouvriers retraités. Nous avons suffisamment de vieillards, de jeunes dans la misère, frappés par la maladie, de chômeurs permanents, de femmes vouées à la prostitution. Pour remédier à toute cette misère humaine, nous aurons bien besoin des sommes que le Plan, trop généreux, est prêt à attribuer aux exploiteurs et à leurs descendants pendant un demi‑siècle. Mais cela signifie, camarades, vouloir élever deux nouvelles générations de fainéants ! Non, ce seul paragraphe suffit pour compromettre irréparablement le Plan tout entier aux yeux des masses affamées. Biffez, camarades, ce paragraphe, aussitôt que possible. Voilà encore une proposition de notre U.D.

L'abolition du secret commercial.,

Les « Notes à l'usage des propagandistes » nous apprennent : « La fraude fiscale est élevée à la hauteur d'une institution. » C'est très bien dit. C'est juste et clair. Mais il ne s'agit pas que de la fraude fiscale. Les affaires Oustric et Stavisky [5] nous ont rappelé que toute l'économie capitaliste est basée, non seulement sur l'exploitation légalisée, mais aussi sur la fraude générale. Pour cacher la fraude aux yeux du peuple, il existe un moyen magnifique qui s'appelle le secret commercial. On prétend qu'il est nécessaire pour la concurrence. C'est un mensonge monstrueux. La loi sur les ententes industrielles, de Flandin, démontre que les capitalistes n'ont plus de secret entre eux. Le soi‑disant secret du commerce n'est pas autre chose que la conspiration des gros capitalistes contre les producteurs et les consommateurs. L'abolition du secret commercial doit être la première revendication du prolétariat qui se prépare à diriger l'économie nationale.

A vrai dire, le plan de la C.G.T. n'est pas encore un plan : il ne contient que des directives générales et même peu précises. Un vrai plan économique exige des données concrètes, des chiffres, des diagrammes. Nous sommes naturellement bien loin de cela. La première condition pour une première esquisse du Plan consiste à mettre en évidence tout ce que la nation possède en forces productives, matérielles et humaines, en matières premières, etc. Il faut connaître le vrai prix de revient, comme les « faux frais » de la fraude capitaliste et, pour cela, il faut abolir une fois pour toutes le complot des fraudeurs qui se nomme le secret commercial.

Le contrôle ouvrier.

Le Plan parle, quoique très brièvement, du contrôle ouvrier (voir les conseils de gestion). Nous sommes, dans l'Isère, résolument partisans du contrôle ouvrier. On rencontre souvent cette objection : « Le contrôle ne nous suffit pas. Nous voulons la nationalisation et la direction ouvrière ». Cependant nous n'opposons nullement ces deux mots d'ordre l'un à l'autre. Pour que les ouvriers prennent la gestion de l'industrie ‑ ce qui est absolument nécessaire aussitôt que possible pour le salut de la civilisation ‑, il faut revendiquer immédiatement le contrôle ouvrier, comme aussi le contrôle paysan sur certaines banques, sur les trusts d'engrais, de la meunerie, etc.

Pour que la nationalisation s'opère, non pas bureaucratiquement, mais révolutionnairement, il faut que les ouvriers y participent à chaque étape. Il faut qu'ils s'y préparent dès maintenant. Il faut qu'ils interviennent dès maintenant dans la gestion de l'industrie et de l'économie tout entière sous la forme du contrôle ouvrier en commençant par leur usine. Le Plan, qui envisage ce contrôle sous la forme de collaboration de classes, en mettant la représentation ouvrière en minorité devant la bourgeoisie (voir conseils d'industrie), prescrit par surcroît que le délégué de chaque catégorie de producteurs doit être nommé par l' « organisation professionnelle ». Nous ne pouvons pas nous faire à cette proposition. Nos syndicats n'englobent malheureusement qu'un douzième ou un quinzième du salariat ; le syndicat n'est pas un but en soi, sa mission est au contraire d'entraîner dans la gestion des affaires publiques toute la masse travailleuse.

La grève sera profitable aux ouvriers, syndiqués ou non, seulement à la condition que l'avant‑garde syndicale entraîne la massé entière dans l'action. Pour l'efficacité du contrôle ouvrier, la même condition est primordiale. C'est pourquoi le comité de contrôle dans chaque usine ne doit pas être composé seulement des délégués du syndicat, c'est‑à‑dire du quinzième des ouvriers. Non, il doit être élu par tous les ouvriers de l'usine, sous la direction du syndicat. Ce serait là le vrai commencement de la démocratie ouvrière libre et honnête, par opposition à la démocratie bourgeoise corrompue jusqu'à la moelle.

La semaine de quarante heures.

Le Plan réclame l'application de la semaine de quarante heures sans diminution des salaires. Voilà un mot d'ordre indiscutable. Mais nous savons trop bien que la classe dirigeante et son État se tournent dans l'autre sens, c'est‑à-­dire qu'ils veulent abaisser les salaires sans diminuer le nombre des heures de travail. Quels sont donc nos moyens pour aboutir à la semaine de quarante heures ? Les « Notes à l'usage des propagandistes » nous apprennent qu'« une action a été engagée pour l'aboutissement d'une convention internationale », et continuent : « Il se peut qu'elle aboutisse prochainement. » Il se peut.... ce n'est pas bien précis et, étant donné la situation économique et politique internationale, nous sommes plutôt enclins à conclure : il ne se peut pas. Si nous nous trompons, notre représentant à Genève corrigera notre pessimisme. jusqu'à nouvel ordre, les chômeurs de Grenoble ‑ et nous en avons ! - n'attendent pas grand‑chose des ententes genevoises.

Et qu'est‑ce qu'on nous propose, à part l'espoir de l'aboutissement prochain d'une convention diplomatique ? Les «Notes » poursuivent : « La propagande doit être poursuivie dans le pays pour faire comprendre la portée sociale de cette revendication ouvrière ». Simplement pour « faire comprendre » ? Mais tous les ouvriers, même les plus simples, comprennent très bien l'avantage de la semaine de quarante heures sans diminution de salaire. Ce qu'ils attendent de la C.G.T., c'est l'indication des moyens par lesquels on peut aboutir à la réalisation de ce mot d'ordre [6]. Mais c'est ici précisément que commence la grande lacune du Plan : il fait des propositions, il émet des suggestions, il formule des mots d'ordre, mais il se tait totalement sur les moyens de leur réalisation.

La question paysanne.

Cependant, avant de passer à la question des moyens de réalisation du Plan, il faut nous arrêter sur une question d'une gravité exceptionnelle : la question paysanne. Tout le monde en parle, tout le monde proclame la nécessité d'améliorer la situation des paysans, mais il y a beaucoup de malins qui voudraient préparer pour les paysans une omelette sans casser les œufs du grand capital. Cette méthode ne peut être la nôtre.

Commentant le Plan, les « Notes à l'usage des propagandistes » disent : « Il faut libérer les paysans de la double étreinte : trusts des engrais au départ, consortium des grands moulins et de la meunerie à l'arrivée. »

Il est bien de dire : « Il faut libérer les paysans », mais vous savez bien que le paysan n'aime pas les formules vagues et platoniques. Et il a diablement raison. « Il faut libérer ». Mais comment ? Voici la seule réponse possible : il faut exproprier et nationaliser les trusts des engrais et la grande meunerie, et les mettre vraiment au service des agriculteurs et des consommateurs. On ne peut pas aider les paysans sans porter atteinte aux intérêts du grand capital.

Le Plan parle de la « réorganisation générale de la production agricole », mais il ne précise ni le sens de cette réorganisation, ni ses moyens. L'idée d'exproprier les paysans ou de les forcer par la violence à se mettre sur la voie de la production socialiste est si absurde qu'elle ne vaut pas la peine d'être critiquée ; personne d'ailleurs ne propose de telles mesures. C'est la paysannerie elle‑même qui doit choisir la voie de son salut. Le prolétariat assurera à ce qu'auront choisi les paysans son appui sincère et efficace. Les coopératives paysannes sont les moyens les plus importants pour permettre la libération de l'économie agricole des cloisons trop étroites de la parcelle. Les commentaires du Plan disent : « Les coopératives paysannes de production de stockage et de vente doivent être encouragées et aidées ». Malheureusement, on ne nous dit pas par qui et comment elles doivent être encouragées et aidées. Nous retrouvons à chaque étape la même lacune. Les revendications du Plan ont souvent l'air de lettres sans adresse.

Sous quel régime politique ?

Qui est‑ce qui nationalisera les banques, les industries‑clés, viendra en aide aux paysans, introduira la semaine de quarante heures, en un mot, appliquera le programme de la C.G.T. ? Qui, et comment ? Cette question, camarades, est décisive. Si elle reste sans réponse, le Plan tout entier reste suspendu en l'air.

C'est dans le paragraphe sur les « Nationalisations industrialisées » que nous trouvons en passant une réponse indirecte et tout à fait étonnante à la question qui nous intéresse. Voilà comment l'objectif même du Plan est défini dans ce paragraphe : « Il s'agit d'établir ( ... ) les modalités techniques d'un programme qui puissent être applicables indépendamment du régime politique. » On se frotte involontairement les yeux une ou deux fois en lisant cette formule invraisemblable. Ainsi, le plan qui doit être dirigé contre les banquiers, les magnats des trusts, contre les quatre‑vingt‑dix dictateurs de la France et des colonies, le plan qui doit sauver les ouvriers, les paysans, les artisans, les petits commerçants, les employés et les petits fonctionnaires, ce plan serait indépendant du régime politique ? Autrement dit, le gouvernail de l'État peut rester, comme il l'est actuellement, dans les mains des exploiteurs, des oppresseurs, des affameurs du peuple, n'importe, la C.G.T. présente à ce gouvernement son plan de rénovation économique ? Disons‑le franchement et ouvertement, cette prétendue indépendance du Plan à l'égard du régime politique annihile totalement sa valeur réelle en le plaçant en dehors de la réalité sociale.

Qui détient le pouvoir ?

  Ce ne sont naturellement pas les formes constitutionnelles ou bureaucratiques du régime étatique qui nous intéressent  en ce mo­ment. Mais il y a une question qui domine toutes les autres, c'est celle‑ci : quelle est la classe qui détient le pouvoir ? Pour transformer la société féodale en société capitaliste, il a fallu que la bourgeoisie arrache par la violence le pouvoir des mains de la monarchie, de la noblesse, et du clergé. Le Tiers État a très bien compris que son plan de « rénovation économique et sociale » exigeait un régime adéquat. Et de même que la bourgeoisie consciente n'a pas chargé Louis Capet d'abolir le régime médiéval, le prolétariat ne peut char­ger ni Flandin, ni Herriot, ni d'autres chefs de la bourgeoisie d'ap­pliquer le plan qui doit aboutir à l'expropriation de la bourgeoisie elle‑même. Celui qui détient le pouvoir décide des formes de la propriété et toute la réforme se réduit en dernière analyse à l'abo­lition de la propriété privée et à l'instauration de la propriété col­lective ou socialiste des moyens de production. Celui qui croit que la bourgeoisie est capable de s'exproprier elle‑même est peut‑être un excellent poète, mais je ne lui confierai pas, pour ma part, la caisse du moindre syndicat, parce qu'il vit dans le domaine des rêves et que nous voulons, nous, rester dans la réalité.

Il faut le dire carrément : seul un gouvernement révolutionnaire, celui des ouvriers et des paysans, prêt à la lutte implacable contre tous les exploiteurs, peut appliquer le Plan, le compléter, le développer et le dépasser dans la voie du socialisme. Cela signifie pour le prolétariat : conquérir le pouvoir.

La lutte des classes ou leur collaboration.

A qui s'adresse le Plan ? Aux possédants pour les attendrir ou aux dépossédés pour les dresser contre l'oppression ? Nous autres, propagandistes, devons tout de même savoir à qui nous nous adressons et sur quel ton. Ni le Plan ni les commentaires ne nous instruisent là‑dessus. L'exposé officiel nous dit que le plan lancé par la C.G.T. doit être « favorablement accueilli du grand public ». Je vous demande, camarades, et je me demande à moi‑même : qu'est‑ce que cela veut dire, le grand public ? Ce n'est pas, je suppose, le public des grands boulevards. Dans le mouvement syndical, dans la lutte sociale, nous nous sommes habitués à discerner avant tout les classes : le prolétariat, la bourgeoisie, les différentes couches de la petite bourgeoisie. Nous espérons bien que le prolétariat et les couches inférieures de la petite bourgeoisie accepteront favorablement le Plan, à condition qu'il soit mis au point, épuré des équivoques et présenté aux masses comme un programme de lutte. Mais les ouvriers et les paysans pauvres, ce n'est pas le grand public. Veut‑on dire par exemple que c'est la grosse bourgeoisie qui doit accepter le plan de la C.G.T. ? Non, évidemment, on ne veut pas se moquer de nous. Consultons le Temps. Il y a quelques semaines, ce journal qui représente bien les quatre‑vingt‑dix magnats du capital, c'est‑à‑dire l'oligarchie dirigeante, protestait véhémentement contre toute participation des syndicats ouvriers aux corporations industrielles. je vous cite deux phrases qui valent des volumes : « La paix sociale a été obtenue sous l'Ancien régime au prix de l'interdiction de toute association ouvrière ». Voilà la grosse bourgeoisie aux abois qui cherche maintenant son inspiration dans l'Ancien régime ! Et puis le même article dit : « Le corporatisme signifie ici le syndicalisme ». Le Temps nous démontre ainsi chaque jour que la classe dirigeante, non seulement ne se prépare pas à faire des concessions dans le sens du plan de la C.G.T., mais au contraire qu'elle envisage la possibilité d'écraser la C.G.T. elle‑même.

Jaurès a très bien dit que le Temps, c'est la bourgeoisie faite journal. Avec cette bourgeoisie qui s'inspire maintenant de l'Ancien régime pour interdire toute association ouvrière, la collaboration est‑elle possible ? Poser cette question, c'est y répondre. Il ne reste que la lutte implacable, et jusqu'au bout.

Le principal défaut du Plan.

Les observations, les critiques et les suggestions que je présente ici au nom de notre union départementale sont déjà assez volumineuses et je suis malheureusement loin d'avoir épuisé les questions même les plus importantes. Aussi est‑il d'autant plus nécessaire d'indiquer le défaut fondamental du Plan : ses auteurs veulent se placer au‑dessus des classes, c'est‑à‑dire en dehors de la réalité. Ils parlent du grand public, alors qu'ils veulent gagner tout le monde. Ils veulent nationaliser les banques, mais sans préjudice pour la haute finance, nationaliser les trusts en assurant luxueusement le parasitisme de trois générations de la grosse bourgeoisie. Ils veulent venir en aide aux paysans sans porter atteinte aux intérêts des propriétaires des trusts d'engrais et de la grosse meunerie. Ils veulent aussi évidemment gagner tous les régimes politiques possibles, puisqu'ils déclarent leur plan neutre envers les partis et même les régimes politiques. Il me semble même que des expressions recherchées et incompréhensibles comme les « nationalisations industrialisées », etc. sont choisies pour ne pas effaroucher les oreilles délicates des magnats des trusts.

Ce procédé n'est pas seulement inutile, il est dangereux ; il n'est pas seulement dangereux, il est néfaste. Qui veut trop embrasser mal étreint ou emporte peu. Nous ne gagnerons pas la bourgeoisie, elle a une conscience inébranlable, elle se moque de nos conseils, elle s'apprête à nous écraser. Plus nous sommes doux, conciliants et obséquieux envers la bourgeoisie, moins elle nous estime et plus elle devient intransigeante et arrogante. Cette leçon se dégage, il me semble' de toute l'histoire de la lutte des classes.

D'autre part, en poursuivant de nos sollicitations le prétendu grand public et en faisant concession sur concession pour adoucir l'idole capitaliste, nous risquons de mécontenter les déshérités qui commencent déjà à se dire : « Ce sont les conseillers des classes possédantes et non pas les chefs des classes opprimées. » Nous ne gagneront jamais le cœur de l'ennemi de classe, mais nous risquons de perdre définitivement la confiance de notre propre classe. C'est la méconnaissance de cette règle fondamentale qui constitue le principal défaut du Plan. Il faut le remanier, il faut s'adresser directement aux salariés et aux exploités, il faut tenir un langage clair et ferme, il faut transformer le Plan en un programme d'action du prolétariat tout entier.

Le Front unique du prolétariat.

Les « Notes pour les propagandistes » nous recommandent de « cristalliser toutes les bonnes volontés ». C'est vague. Où faut‑il les chercher ? Nous connaissons les classes et leurs organisations, mais nous connaissons surtout la mauvaise volonté de la bourgeoisie. Pour la briser, il faut lui opposer la volonté révolutionnaire de la classe ouvrière. Quant aux classes moyennes, elles ne mettront leur confiance dans le prolétariat que si celui‑ci démontre par son action sa confiance en lui-même.

Il est absurde et même criminel de chercher les bonnes volontés dans la bourgeoisie en brisant et en paralysant la bonne volonté révolutionnaire du prolétariat. Il nous faut, coûte que coûte, le Front unique de notre classe. L'unité syndicale en premier lieu, l'unité d'action de toutes les organisations ouvrières, syndicales, politiques, coopératives, éducatives et sportives avec un but précis : l'application du, plan de nationalisation ou de socialisation par la conquête du pouvoir.

Il faut mobiliser tous les vrais militants ouvriers pour une campagne vigoureuse dans le pays. Il faut que les paysans, dans les plus lointains hameaux, se convainquent que le prolétariat s'apprête cette fois sérieusement à renverser la bourgeoisie, à prendre le pouvoir dans ses mains pour transformer notre pays, pour le rendre enfin habitable pour le peuple travailleur [7].

Ou bien le plan sera transformé en un plan de conquête du pouvoir par le prolétariat pour l'instauration d'un gouvernement ouvrier et paysan, ou bien il sera enregistré par le peuple comme nul et non opérant. L'U.D. de l'Isére est pour l'action révolutionnaire. Si vous faites appel à nous dans ce sens, nous vous répondrons : Présent !


Notes

[1] C'est en 1933 que le socialiste belge Henri de Man avait fait adopter les thèses sur la planification au congrès du parti ouvrier belge. Les idées « planistes » furent répandues en France par le groupe « Révolution constructive », dont Georges Lefranc était l'un des animateurs. Le bureau d'études créé sur proposition de Jouhaux près du C.C.N. de la C.G.T. en mai 1934,  élabora un « plan de travail », qui fut adopté en octobre 1934 par le C.C.N.

[2] Pierre Taittinger, chef de file des J.P., et Henry Dorgères, leader du Front paysan, étaient deux des plus connus parmi les dirigeants des « ligues ». Les démocrates populaires étaient les ancêtres du M.R.P.

[3] Trotsky écrivait par ailleurs : « Ni De Man, ni Jouhaux n'ont inventé leurs plans. Ils ont pris tout simplement les revendications fondamentales du programme de transition marxiste, la nationalisation des banques et des industries‑clés, ont jeté par‑dessus bord la lutte de classes et, à la place de l'expropriation révolutionnaire des expropriateurs, ils ont mis une opération financière de rachat » (« Encore une fois, où va la France ? » Ecrits, t. II, p. 81). Dans son Journal d'exil, le 10 mars, il écrit « Quelle pauvreté d'idées couverte d'une ridicule grandiloquence bureaucratique ! Et quelle avilissante lâcheté devant les maîtres ! » (pp. 65‑66).

[4] Les nationalisations devaient être ultérieurement écartées du programme du Front populaire sur l'insistance des communistes. Cf. Maurice Thorez, dans l’Humanité du 13 juillet 1936 : « Les camarades du parti socialiste voulaient introduire dans le programme les nationalisations. Nous nous sommes refusés à semer des illusions. Nous avons tenu bon. Nous avons eu raison. »

[5] La faillite de la banque Oustric, en 1926, entraîna un scandale dans lequel furent compromis plusieurs parlementaires. Le ministre des finances Raoul Péret, traduit en Haute‑Cour, fut acquitté. Quant au scandale Stavisky, découvert en décembre 1933, on sait qu'il rejaillit lui aussi sur les milieux parlementaires, fournissant aux Ligues, au début de 1934, la matière de leurs attaques contre la « corruption du parlementarisme ».

[6] On sait que la loi sur les quarante heures fut votée dans la nuit du 11 au 12 juin 1936 par 480 voix contre 160, sous la pression de la gigantesque vague de grèves avec occupation des usines qui avait précédé de quelques jours la formation du gouvernement Blum de Front populaire.

[7] Trotsky pensait que le Plan avait pour objectif de « masquer le dernier krach du réformisme et d'inspirer de nouveaux espoirs au prolétariat pour le détourner de la révolution ». Mais il pensait également : « Le Plan, lancé pour détourner les ouvriers de « mauvaises pensées » peut devenir le drapeau du mouvement révolutionnaire ». Au C.C.N. de mars, Jouhaux escamota la discussion sur la propagande pour le Plan. Trotsky écrit : « En janvier, la C.A.P. du parti socialiste proposa au parti communiste une lutte commune pour le pouvoir au nom de la socialisation des banques et des branches concentrées de l'industrie ( ... ) Mais, dans le C.C. du parti communiste siègent, non des révolutionnaires, mais des mandarins. « Il n'y a pas de situation révolutionnaire », répondirent‑ils, en contemplant leur nombril. Les réformistes de la S.F.I.O. respirèrent de soulagement : le danger était passé. Jouhaux se hâta de retirer de l'ordre du jour la question de la propagande pour le Plan. Le prolétariat est resté dans la grande crise sociale sans aucun programme. » L'idée d'utiliser le plan de la C.G.T. pour une mobilisation des travailleurs pour des revendications transitoires fut également soutenue par Marceau Pivert (Le Populaire, 18 mars 1935, « Tout se tient »), mais combattue par Daniel Guérin au sein de la Gauche Révolutionnaire (Front populaire, révolution manquée, pp. 77‑78).


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