1965 |
"(...) de toute l'histoire antérieure du mouvement ouvrier, des enseignements de toute cette première période des guerres et des révolutions, de 1914 à 1938, analysés scientifiquement, est né le programme de transition sur lequel fut fondée la IV° Internationale. (...) Il est impossible de reconstruire une Internationale révolutionnaire et ses sections sans adopter le programme de fondation de la IV° Internationale comme base programmatique, au sens que lui conférait Trotsky dans la critique du programme de l'I.C. : définissant la stratégie et la tactique de la révolution prolétarienne." |
Défense du trotskysme (1)
Pablo révise le marxisme
Le monde étonné devait apprendre en 1950-1951 que tout cela n'était que vétilles. Pablo, secrétaire de l'Internationale, commentant le projet de « thèses sur les perspectives internationales et l'orientation de la IV° Internationale » présenté par le 9° plenum en vue du troisième congrès mondial, écrivait un article : « Où allons-nous ? », véritable manifeste du « pablisme », qui nous en avertissait :
« Le problème, pour un véritable mouvement marxiste-révolutionnaire, n'est pas de vouloir faire entrer coûte que coûte la réalité nouvelle dans ses normes de pensée d'hier, mais d'élargir et de modeler celles-ci de façon à les mettre en harmonie avec les nouveaux développements objectifs... »
(« Quatrième Internationale », vol. 9, n° 2-4, février-mars 1951, p. 40.)
En quelques lignes, il « bouleversait » le marxisme :
« La réalité sociale objective, pour notre mouvement, est composée essentiellement du régime capitaliste et du monde stalinien. Du reste, qu'on le veuille ou non, ces deux éléments constituent la réalité objective tout court, car l'écrasante majorité des forces opposées au capitalisme se trouvent actuellement dirigées ou influencées par la bureaucratie soviétique. »
(Idem, p. 41.)
Finie la division de la société en classes, phénomène objectif, indépendant de la conscience qu'en ont ou n'en ont pas les individus qui composent ces classes : seuls subsistaient le « monde stalinien » et le « régime capitaliste ». Pablo substituait à l'analyse scientifique la métaphysique de catégories politiques, voire géographiques, qui n'étaient que le reflet, dans les cerveaux petits-bourgeois, des aspects superficiels de la situation internationale depuis la guerre froide.
Les déportés de Karaganda ou de Vorkhouta, les millions de victimes de la terreur stalinienne se retrouvaient ainsi dans le même « monde » que la bureaucratie parasitaire et contre-révolutionnaire du Kremlin. Quant aux prolétaires des pays capitalistes, que devenaient-ils ? Pablo nous donnait de leurs nouvelles, en même temps qu'il nous expliquait ce qu'ils pouvaient encore faire dans la vie :
« ... Le vrai rapport des forces entre l'impérialisme et les forces qui lui sont opposées » ( à savoir, dans la « réalité sociale objective » pabliste, le « monde stalinien » ) « ne se mesure pas SIMPLEMENT (souligné par nous) sur le plan des ressources matérielles et techniques réciproques, mais AUSSI (souligné par nous) sur le plan des rapports sociaux, des rapports de classes, et... ces rapports évoluent internationalement au désavantage de l'impérialisme; ( ... ) l'élan révolutionnaire des masses dressées contre l'impérialisme s'ajoute comme une force SUPPLÉMENTAIRE (souligné par nous) aux forces matérielles et techniques qui combattent cet impérialisme. »
(Idem, p. 42.)
Ainsi, les « rapports de classes », les « rapports sociaux », ne subsistaient plus que comme compléments des « forces matérielles et techniques » opposées à l'impérialisme. Et qui donc disposait de ces « forces matérielles et techniques », sinon la bureaucratie parasitaire du Kremlin, maîtresse du pouvoir politique dans le « monde stalinien » ?
« L'élan révolutionnaire des masses dressées contre I'impérialisme s'ajoute comme une force supplémentaire... » : il doit donc être politiquement subordonné aux « forces matérielles et techniques » dont dispose la bureaucratie du Kremlin.
C'était la négation de toute la conception marxiste de l'histoire : en bonne logique, cette conception aurait dû être proscrite, comme affaiblissant la lutte du « monde stalinien » contre le « régime capitaliste ».