1965 |
"(...) de toute l'histoire antérieure du mouvement ouvrier, des enseignements de toute cette première période des guerres et des révolutions, de 1914 à 1938, analysés scientifiquement, est né le programme de transition sur lequel fut fondée la IV° Internationale. (...) Il est impossible de reconstruire une Internationale révolutionnaire et ses sections sans adopter le programme de fondation de la IV° Internationale comme base programmatique, au sens que lui conférait Trotsky dans la critique du programme de l'I.C. : définissant la stratégie et la tactique de la révolution prolétarienne." |
Défense du trotskysme (1)
Le "Néo-trotskysme" en quête d'un "néo-programme"
Cependant, on crie au viol, à l'assassin. Vous n'avez rien compris ! Vous escroquez ! Vous falsifiez ! Pierre Frank comme Mandel, qui lui fournit sa nourriture théorique, ne cessent de répéter : « revendications de transition », « question du pouvoir », etc. Fort bien. Pourquoi ne mettent-ils pas au centre de toute leur ligne la rupture avec la bourgeoisie, la dénonciation de l'état bourgeois, le problème de l'état ? Pourquoi veulent-ils, du programme de transition, ne plus garder (Frank, article cité, p. 49) que « les choses (encore) valables pour les couches les plus défavorisées de la classe ouvrière européenne » (lesquelles ?) et le « compléter (le réviser) par une série de revendications nouvelles résultant des progrès qui sont intervenus entre temps par suite d'une période exceptionnelle de haute conjoncture » (lesquelles ?)
Des revendications ayant pour axe « le contrôle ouvrier (qui) est une initiation à la planification socialiste et démocratique, la seule réponse efficace que l'on puisse apporter à la programmation capitaliste » répondent en chur Frank et Mandel, plagiant Trotsky en le déformant. S'il s'agit de contrôle ouvrier, point n'est besoin, nous l'avons vu, de « compléter » (de réviser) le Programme de transition. Le contenu révolutionnaire du contrôle ouvrier tient à ce qu'il est lié aux « comités d'usine », instruments indispensables de lutte. Et, dit encore le programme de transition : « Dès le moment de l'apparition du comité dans l'usine, il s'établit en fait une dualité de pouvoir. Par son essence même elle est quelque chose de transitoire, car elle renferme en soi deux régimes inconciliables : le régime capitaliste et le régime prolétarien ». (Nouvelle édition, p. 17.)
Deux pouvoirs dans l'entreprise ne peuvent pas plus coexister que deux pouvoirs politiques. Il ne se peut pas, non plus, que coexistent le pouvoir d'état bourgeois et le pouvoir « économique » ouvrier dans l'entreprise. Il y a un lien indissoluble entre le contrôle ouvrier et la constitution d'organismes du pouvoir politique prolétarien, s'opposant à l'appareil d'état bourgeois, tendant à le détruire et à se substituer à lui.
Le programme de transition est précisément d'une brûlante actualité, il est extrêmement concret, parce qu'il est l'expression programmatique de cette nécessité. Voilà pourquoi P. Frank et Mandel veulent le « compléter » (le réviser). Leur « contrôle ouvrier, initiation à la planification socialiste » se situe dans le cadre de l'état bourgeois - c'est « l'apprentissage de la gestion », comme disent les sociaux-démocrates. Une telle conception a été toujours une duperie; mais aujourd'hui, c'est en plus mettre le doigt dans l'engrenage de la domestication de la classe ouvrière par l'état bourgeois, l'intégration des syndicats à l'état.
« Les comités des diverses entreprises doivent élire, à des conférences correspondantes, des comités de trusts, de branches d'industrie, de régions économiques, enfin de toute l'industrie nationale dans son ensemble. » Le contrôle ouvrier ne peut se développer réellement qu'au niveau de l'économie tout entière, et nullement limité à une usine, un trust, etc. « Ainsi, le contrôle ouvrier deviendra L'ÉCOLE DE L'ÉCONOMIE PLANIFIEE. » (Idem, p. 20.) Les comités d'usines constituent des organismes de combat pour les travailleurs. Ils sont les organes embryonnaires du pouvoir de la classe ouvrière. La lutte pour le contrôle ouvrier est inséparable de la lutte pour le pouvoir du prolétariat. C'est ainsi que le Programme de transition conçoit le mot d'ordre du contrôle ouvrier.
Il n'existe pas de néo-capitalisme. Les traits de l'impérialisme se sont particulièrement accentués en ce qui concerne le rôle de l'état. Chaque lutte importante de la classe ouvrière débouche immédiatement sur la question de l'état. En d'autres termes, les contradictions économiques et sociales du mode de production capitaliste s'expriment de plus en plus directement sous forme politique. Jamais il n'est apparu aussi clairement que « la politique, c'est de l'économique concentrée » (Lénine). C'est ce qui donne au Programme de transition, dont « la tâche consiste en une mobilisation systématique pour la révolution prolétarienne », sa pleine signification.
Les traits nouveaux ou accentués de l'impérialisme ne font qu'exprimer « les propriétés essentielles du capitalisme » avec plus d'acuité. Le « néo-capitalisme », expression reprise à la terminologie des « savants » petits-bourgeois, sert ici une tentative de donner une base « objective » au « néo-trotskysme ». Le révisionnisme devait remettre en cause la définition scientifique donnée par Marx et Lénine de l'état. Les staliniens révisent ouvertement Lénine avec leur « théorie » du passage pacifique du capitalisme au socialisme. Les « néo-trotskystes » révisent Trotsky et veulent un « néoprogramme ». Tous rejoignent le réformisme le plus éculé... Mais à l'heure où « le capitalisme monopoleur... réclame de la bureaucratie réformiste et de l'aristocratie ouvrière... qu'elles soient toutes les deux transformées en sa police politique au sein de la classe ouvrière ». (Les syndicats à l'époque de la décadence impérialiste.)