1914 |
"On ne peut pas comprendre totalement « le Capital » de Marx et en particulier son chapitre I sans avoir beaucoup étudié et sans avoir compris toute la Logique de Hegel." |
Résumé de la Science de la logique de Hegel
DE QUOI DOIT ÊTRE FAIT LE COMMENCEMENT DE LA SCIENCE ?
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(Le thème de la logique. Comparer avec la « gnoséologie » d'aujourd'hui) |
NB |
(60)... « Il n'y a rien » (italiques de Hegel), « rien dans le ciel, ni dans la nature, ni dans l'esprit, ni où que ce soit, qui ne renferme tout autant l'immédiateté que la médiation »... |
1° Le ciel — la nature — l'esprit. Chassez le ciel : matérialisme.
2° Tout est vermittelt=médiatisé, lié en un, relié par des passages. Chassez le ciel — liaison, loi de tout le (processus) du monde.
(62) « La logique est la science pure, c'est-à-dire le pur savoir dans l'étendue TOTALE de son DÉVELOPPEMENT »...
la 1re ligne est du galimatias
la 2e est géniale.
Par où commencer ? « L'être pur » (Sein) (63), « il ne doit être fait aucune présupposition », est le commencement. « Il est nécessairement dépourvu de tout contenu »... « il ne doit être médiatisé par rien »...
NB |
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(68) Le commencement contient en soi et le « Nichts » et le « Sein »3, il est leur unité : ...« ce qui commence n'est pas encore ; il accède seulement à l'être »... (du non-être vers l'être : « non-être qui est en même temps être »). |
Sottises sur l'absolu (68—69). D'une manière générale je m'efforce de lire Hegel en matérialiste : Hegel, c'est le matérialisme mis sur la tête (d'après Engels) — c'est-à-dire, j'élimine en grande partie le bon Dieu, l'Absolu, l'Idée pure, etc.
(70—71) On ne peut pas commencer là philosophie par le « Moi », Pas « de mouvement objectif ».
PREMIÈRE SECTION : LA DÉTERMINITÉ (QUALITÉ)
(77) L'être pur — « sans aucune détermination ultérieure »
(Bestimmung est déjà Qualität4).
Passage du Sein5 — en Dasein6 (être présent ? fini ?) —
et de celui-ci au Fürsichsein (être pour soi ?)
Sein — Nichts — Werden7
« L'être pur et le néant pur sont... la même chose » (78).
(81 : Cela semble un « paradoxe »). Leur union est le Werden.
« Ce mouvement du disparaître immédiat de l'un dans l'autre »...
On oppose le Nichts dem Etwas8 Mais l'Etwas est déjà un être déterminé, distinct d'un autre Etwas, tandis qu'il s'agit ici du simple Nichts (79).
(Les Eléates et particulièrement Parménide sont parvenus les premiers à cette abstraction de l'être.) Chez Héraclite « tout coule » (80) ...c'est-à-dire « tout est devenir ».
Ex nihilo nihil fit ?9 Du Nichts sort le Sein (Werden)...
(81) : « Il ne serait pas difficile de mettre en évidence cette unité de l'être et du néant... dans chaque (italiques de Hegel) réel effectif ou pensée »... « Il n'y a nulle part dans le ciel et sur la terre quelque chose qui ne renferme en soi à la fois l'être et le néant ». Les objections introduisent subrepticement un bestimmtes Sein10 (j'ai ou je n'ai pas 100 thalers) 82 i.f.11 — mais ce n'est pas de cela qu'il est question...
« Lien nécessaire de tout l'univers »... « lien de détermination réciproque du tout » |
« Un être déterminé, un être fini est un être qui se rapporte à autre chose ; c'est un contenu qui se tient dans un rapport de nécessité avec un autre contenu, avec le monde tout entier. C'est eu égard à ce lien de détermination réciproque du tout que la métaphysique pouvait produire cette affirmation, tautologique en son fond, que si un seul grain de poussière était détruit, tout l'univers s'effondrerait » (83). |
NB |
(86) : « Ce qui est premier dans la science a dû nécessairement se montrer dans l'histoire comme premier. » (Rend un son tout à fait matérialiste !) |
91 : « Le devenir est le subsister de l'être autant que du non-être »... « Passer est la même chose que devenir »... (92 i.f).
94 « Chez Parménide, comme chez Spinoza, on ne doit pas passer de l'être ou de la substance absolue au négatif, au fini. »
Quant à Hegel, pour lui l'unité ou l'inséparabilité (p. 90 cette expression est parfois meilleure qu'unité) de « l'être » et du « néant " donne le passage, le Werden.
L'absolu et le relatif, le fini et l'infini=parties, degrés d'un seul et même univers. So etwa ?12
(92 : Pour « l'être qui est médiatisé nous garderons l'expression : existence ».)
102 : Chez Platon dans le Parménide, le passage à partir de l'être et de l'un — « aüssere Reflexion13 ».
104 : On dit que l'obscurité est l'absence de lumière. Mais « dans la lumière pure, on voit tout aussi peu que dans l'obscurité pure»...
107 — Référence aux grandeurs infiniment petites, qui sont prises dans le processus de leur disparition...
NB |
« Il n'y a absolument rien qui ne soit un état intermédiaire entre l'être et le néant. » |
« Le commencement est quelque chose d'inconcevable » — si le néant et l'être s'excluent réciproquement ; mais ce n'est pas là de la dialectique, c'est de la Sophisterei14.
« Car la sophistiquerie est un raisonnement à partir d'une présupposition dépourvue de fondement et qu'on laisse valoir sans critique et de manière inconsidérée, alors que nous appelons dialectique le plus haut mouvement de la raison, et dans lequel des termes paraissant tout à fait |
Sophistiquerie et dialectique |
séparés passent l'un dans l'autre par eux-mêmes, par ce qu'ils sont, et la présupposition s'abroge » (108). |
Le Werden. Ses moments : Entstehen und Vergehen15. (109).
Das Aufheben des Werdens — das Dasein16 [être concret déterminé ( ?)]
110: aufheben |
= ein Ende machen |
(aufbewahren zugleich)17 |
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=erhalten |
112 : Dasein ist bestimmtes Sein (NB 114 « ein Konkretes »18),— qualité distincte d'un Anderes — veränderlich und endlich19. |
NB |
114 « La déterminité ainsi isolée pour soi en tant que déterminité étante est la qualité »... « La qualité en ce qu'elle vaut de manière distincte comme étante est la réalité » (115).
117 ...« La déterminité est la négation »... (Spinoza) Omnis determinatio est negatio20, « cette proposition est d'une immense importance »...
120 : « Le quelque chose est la première négation de la négation »...
(Ici l'exposé est fragmentaire et excessivement nébuleux.) |
abstrakte und abstruse Hegelei — Engels.21 |
125 — ...Deux couples de déterminations : 1) « Quelque chose et autre chose» ; 2) « Etre pour l'autre et être en soi. »
127 — Ding an sich22 — « abstraction très simple ». Dire que nous ne savons pas ce que sont les choses en soi semble d'une grande sagesse. La chose en soi est l'abstraction de toute détermination [Sein-für-Anderes23] [de tout
NB |
rapport avec l'autre c'est-à-dire un néant.] Donc la chose en soi « n'est rien d'autre qu'une abstraction vide, dépourvue de vérité ». |
Sehr gut ! !24 si on demande ce que sont les choses en soi, so ist in die Frage gedankenloser Weise die Unmoglichkeit der Beantwortung gelegt...25 (127) |
C'est très profond : la chose en soi et sa transformation en chose pour les autres (cf. Engels26). La chose en soi est de façon générale une abstraction vide et sans vie. |
Dans la vie en mouvement tout et toute chose est aussi bien « en soi » que « pour les autres » par rapport à l'autre, et passe d'un état dans l'autre. |
129 — en passant27 : le philosopher dialectique que ne connaît pas « le philosopher métaphysique, auquel appartient aussi le philosopher critique ». |
Kantisme = métaphysique |
La dialectique est la théorie de la façon dont les contraires peuvent être et sont habituellement (dont ils deviennent) identiques — des conditions dans lesquelles ils sont identiques en se changeant l'un en l'autre — des raisons pour quoi l'esprit humain ne doit pas prendre ces contraires pour morts, figés, mais pour vivants, conditionnés, mobiles, se changeant l'un en l'autre. En lisant Hegel28...
134 : « La limite est négation simple ou première négation » (des Etwas. Tout quelque chose a sa limite), « alors que l'autre est en même temps la négation de la négation »...
137 « Etwas mit seiner immanenten Grenze gesetzt als der Widerspruch seiner selbst, durch den es über sich hinausgewiesen und getrieben wird, ist das Endliche. »
(Quelque chose, posé avec sa limite immanente, en tant que contradiction de soi-même, qui l'éconduit et le pousse au-delà de soi-même, est le fini).
Quand on dit des choses qu'elles sont finies, on reconnaît par là que leur non-être est leur nature (« le non-être constitue leur être »).
« Elles » (les choses) « sont, mais la vérité de cet être est leur fin ».
NB pensées sur la dialectique en lisant Hegel |
Pénétrant et intelligent ! Hegel analyse des concepts qui d'habitude semblent morts et montre qu'il y a du mouvement en eux. Fini ? Donc en mouvement vers la fin î Quelque chose ? donc pas autre chose. Etre en général ? donc une indétermination telle qu'être = non-être. |
Multiforme et universelle souplesse des concepts, souplesse qui va jusqu'à l'identité des contraires,— c'est là le fond. Cette souplesse appliquée subjectivement = éclectisme et sophistique. |
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Appliquée objectivement, c'est-à-dire reflétant le processus matériel dans tous ses aspects et dans son unité, c'est la dialectique, c'est le juste reflet du développement éternel du monde. |
139 — L'infini et le fini seraient opposés ? (v. p. 148) (Cf. p. 151).
141 — Sollen und Schranke, moments des Endlichen29.
143 — « Dans le devoir être commence le dépassement de la finitude, l'infinité. »
sehr gut !30 |
143 — On dit que la raison a ses limites, « Dans cette affirmation réside l'inconscience de ce que, par cela même qu'on détermine quelque chose comme borne, on opère déjà son dépassement. » |
144 : La pierre ne pense pas et c'est pourquoi son caractère limité (Beschranktheit) n'est pas une borne (Schranke) pour elle. Mais la pierre aussi a ses limites, par exemple l'oxydabilité si elle est « une substance sensible à l'action des acides ».
L'évolution de la pierre
144—145 : Tout (ce qui est humain) dépasse sa borne (Trieb, Schmerz, etc.,31), mais la raison, voyez-vous, « ne pourrait pas dépasser la borne » !
« A vrai dire, tout dépassement d'une borne n'est pas une véritable libération de celle-ci » !
Un aimant, s'il était doué de conscience, considérerait comme libre son orientation vers le Nord (Leibniz).— Pas du tout, il connaîtrait alors toutes les directions de l'espace et il considérerait une direction unique comme une borne à sa liberté, comme la limitation de celle-ci.
148... « C'est la nature du fini lui-même de se dépasser, de nier sa négation, et de devenir infini »... Ce n'est pas une force (Gewalt) extérieure (fremde) (149) qui transforme le fini en infini, mais sa nature (seine Natur) (du fini). |
La dialectique des choses elles-mêmes, de la nature elle-même, de la marche même des événements |
151 : (« Schlechte Unendlichkeit »32 — l'infini qualitativement opposé au fini, non lié à lui, séparé de lui comme si le fini était diesseits et l'infini jenseits33, comme si l'infini était au-dessus du fini, en dehors de lui...
153 : Mais en fait sind sie34 (le fini et l'infini) untrennbar35. Ils sont un (155).
Appliquer aux atomes versus les électrons. En général, l'infinité de la matière en profondeur... |
158— 159 : ... « L'unité du fini et de l'infini n'est pas un rapprochement extérieur de ceux-ci ni une réunion incongrue, qui contredirait à leur détermination, dans laquelle deux indépendants, deux étants en soi séparés et mutuellement opposés, partant incompatibles, seraient réunis ; au contraire chacun est à lui-même, cette unité et l'est seulement en tant qu'abroger de soi-même, ce en quoi aucun n'a devant l'autre une prééminence de l'être en soi et de l'être-là affirmatif. Comme on l'a montré plus haut la finitude est seulement comme dépassement de soi, et par conséquent l'infinité, l'autre d'elle-même, est contenue en elle »... |
Liaison |
...« Mais le progrès indéfini exprime davantage » (que la simple comparaison du fini et de l'infini), « ce qui s'y trouve aussi posé, la liaison (italiques de Hegel) de termes aussi distincts »... (160) |
167 « La nature du penser spéculatif... consiste seulement dans la saisie des moments opposés dans leur unité. »
Comment l'infini arrive-t-il au fini : cette question est parfois considérée comme l'essence de la philosophie. Or cette question se ramène à l'élucidation de leur liaison...
Bien dit !36 |
168... « Pour d'autres objets aussi, s'y entendre à poser des questions suppose une éducation, mais plus encore pour les objets philosophiques, si on veut recevoir une autre réponse que : la question ne vaut rien. » |
173—174 : Fürsichsein — l'être pour soi = l'être infini, l'être qualitatif achevé. [Le rapport à l'autre a disparu ; il
reste le rapport à soi-même]. La qualité est poussée à l'extrême (auf die Spitze) et devient quantité.
L'idéalisme de Kant et de Fichte... (181) « demeure dans le dualisme » ((pas clair)) « de l'être-là et de l'être pour soi »...
C'est-à-dire qu'il n'y a pas de passage de la chose en soi (la proposition qui suit en parle) au phénomène ? de l'objet au sujet ?
Pourquoi Fürsichsein est-il Eins37, cela ne m'est pas clair. A mon avis, Hegel est ici tout a fait obscur.
L'Un — c'est le principe antique de άτομον38 (et du vide). Le vide est tenu pour Quell der Bewegung39 (185) non seulement dans le sens que l'espace n'est pas occupé, mais enthält40 aussi « l'idée plus profonde que c'est dans le négatif en général que réside le fondement du devenir, de l'agitation de l'auto-mouvement » (186). |
NB Selbstbewegung41 |
183 : « L'idéalité de l'être pour soi en tant que totalité se mue ainsi, en un premier moment, en la réalité, et qui plus est, en tant que l'un, en la plus compacte, la plus abstraite. »
Eau noire...
L'idée de la transformation de l'idéal en réel est profonde : très importante pour l'histoire. Mais dans la vie personnelle de l'homme également, il est clair qu'il y a là beaucoup de vrai. Contre le matérialisme vulgaire. NB. La distinction de l'idéal et du matériel n'est pas, elle non plus, absolue, überschwenglich42.
189 — Note. Les monades de Leibniz. Le principe de l'Un et son caractère incomplet chez Leibniz.
Visiblement Hegel prend son autodéveloppement des concepts, des catégories, en liaison avec toute l'histoire de la philosophie. Cela donne encore un nouvel aspect de toute la Logique.
193 ...« C'est une vieille proposition que l'Un est beaucoup, et en particulier que : beaucoup est l'Un »...
195... « La différence entre un et beaucoup s'est déterminée comme la différence de leur relation de l'un à l'autre, laquelle se décompose en deux : la répulsion et l'attraction »...
Sans doute Hegel avait besoin de tout ce Fürsichsein en partie pour déduire comment « la qualité se transforme en quantité » (199) ; la qualité est une déterminité, une déterminité pour soi, Gesetzte43, elle est une unité — tout cela donne une grande impression de forcé et de vide.
A noter p. 203 la remarque non dépourvue d'ironie contre « cette démarche du connaître qui réfléchit sur
l'expérience et qui d'abord perçoit dans le phénomène des déterminations, les prend alors pour fondement et admet pour ce qu'on appelle leur explication des matières fondamentales ou forces correspondantes qui sont censées produire ces déterminations du phénomène »...
DEUXIÈME SECTION : LA GRANDEUR (QUANTITÉ)
Chez Kant il y a 4 « antinomies44 ». En fait, chaque concept, chaque catégorie est aussi antinomique (217).
« Le scepticisme antique ne s'est pas épargné la peine de mettre en évidence dans tous les concepts qu'il rencontrait dans la science cette contradiction ou cette antinomie. » |
Le rôle du scepticisme dans l'histoire de la philosophie |
Analysant Kant d'une manière très pointilleuse (et avec esprit), Hegel en arrive à la conclusion que Kant répète simplement dans les conclusions ce qu'il avait dit dans les prémisses, très précisément qu'il répète qu'il y a une catégorie de la Kontinuität45 et une catégorie de la Diskretion46.
Il résulte seulement de cela «qu'aucune de ces déterminations, prise isolément, n'a de vérité, mais seulement leur unité. Ceci est leur véritable considération dialectique de même que le vrai résultat » (226). |
Wahrhafte Dialektik47 |
229 : « Die
Diskretion [traduction ? état de division, de
discontinuité] tout comme die Kontinuität [état de resserrement
(?), de succession (?)48,
continuité] est un moment de la quantité »...
232 : « Le quantum, tout d'abord quantité avec une déterminité ou limite en général — est dans sa déterminité achevée le nombre »...
234 : « Anzahl |
nombre nombrant dénombrement |
? |
et unité constituent les moments du nombre. » |
248 — Au sujet du rôle et de la signification du nombre (beaucoup sur Pythagore, etc., etc.), entre autres, cette
juste remarque :
« Plus les pensées s'enrichissent en déterminations et par conséquent en rapports, plus leur représentation dans des formes telles que les nombres devient d'une part embrouillée et d'autre part arbitraire et dénuée de sens » (248- 249). ((Appréciation des pensées : richesse de déterminations et par conséquent de rapports.))
A propos des antinomies de Kant (monde sans commencement, etc.), Hegel prouve encore une fois des Längeren49 qu'il est admis dans les prémisses comme démontré ce qu'il faut démontrer (267—278).
[Plus loin le passage de la quantité en qualité exposé de façon abstraitement théorique est si obscur qu'on n'y comprend rien. Y revenir ! ! ]
NB |
283 : L'infini en mathématiques. Jusqu'ici la justification repose uniquement sur la justesse des résultats (« qui est établie à partir d'autres raisons »)... et non sur la clarté de l'objet [confer Engels50.] |
285 :, Dans le calcul infinitésimal on néglige une certaine imprécision (avérée) et pourtant le résultat n'est pas approché mais tout à fait exact !
Et pourtant dans ce cas la recherche d'une Rechtfertigung51 « n'est pas aussi superflue » « qu'il semble superflu, pour le nez, d'exiger la preuve du droit qu'on a de s'en servir52 ».
La réponse de Hegel est compliquée, abstrus53, etc., etc. Il s'agit des mathématiques supérieures ; cf. Engels sur le calcul différentiel et intégral54.
[Hegel fait en passant une remarque intéressante : « de façon transcendantale, c'est-à-dire, à proprement parler, subjective et psychologique »... « transcendantalement, c'est-à-dire dans le sujet» (288).]
P. 282-327 u. ff. - 379
Analyse très détaillée du calcul différentiel et intégral avec des citations de Newton, Lagrange, Carnot, Euler, Leibniz, etc., etc., qui prouvent combien Hegel s'intéressait à cette « disparition » des infiniment petits, cet « état intermédiaire entre l'être et le non-être ». Tout cela est incompréhensible si on n'a pas étudié les mathématiques supérieures. Caractéristique ce titre de Carnot : « Réflexions sur la Métaphysique du Calcul infinitésimal »55 !!!
Le développement du concept de Verhältnis (379—394)56 est foncièrement obscur. A noter seulement, p. 394, une remarque sur les symboles : qu'on ne peut rien avoir du tout contre eux. Mais il faut dire « contre toute symbolique » qu'elle est parfois « un moyen commode de s'éviter de saisir, d'exposer et de légitimer les déterminations conceptuelles (Begriffsbestimmungen) ». Or tout cela est précisément l'affaire de la philosophie.
« Les déterminations courantes de force ou de substantialité, cause et effet, etc., ne sont de même que des symboles pour l'expression, par exemple, de rapports vivants ou spirituels, c'est-à-dire des déterminations qui ne sont pas vraies pour eux » (394). |
NB ? |
TROISIÈME SECTION : LA MESURE
« Dans la mesure sont réunies — abstraitement formulé — la qualité et la quantité. L'être en tant que tel est égalité immédiate de la déterminité avec soi-même. Cette immédiateté de la déterminité s'est abrogée. La quantité est l'être revenu en soi-même de telle sorte qu'il est égalité simple avec soi, comme indifférence en face de la déterminité » (395). Le troisième terme est la mesure.
Kant a introduit la catégorie de modalité (possibilité, réalité, nécessité) et Hegel note que chez Kant :
« Cette catégorie a la signification d'être la relation de l'objet au penser. Dans le sens de cet idéalisme, le penser est en général essentiellement extérieur à la chose en soi... l'objectivité qui revient aux autres catégories manque aux catégories de la modalité » (396).
En passant57 (397) :
La philosophie hindoue où Brahma passe en Siva (transformation=disparition, apparition)...
Les peuples divinisent la mesure (399).
? La mesure se change en essence (Wesen).
(A propos de la mesure il n'est pas sans intérêt de noter cette remarque faite en passant par Hegel : « Dans la société civile développée, les quantités d'individus qui appartiennent aux différentes professions sont dans un certain rapport les unes avec les autres ») (402).
A propos de la catégorie de la gradualité (Allmähligkeit), Hegel note :
« On a d'autant plus facilement recours à cette catégorie pour faire se représenter ou pour expliquer la disparition d'une qualité ou de quelque chose, qu'on semble ainsi pouvoir assister à la disparition et comme la suivre des yeux, parce que le quantum, qui est posé comme limite extérieure, changeante par nature, va de soi pour l'entendement et par conséquent aussi le changement considéré comme changement du seul quantum. Mais, en réalité, rien n'est expliqué par là ; le changement est aussi essentiellement le passage d'une qualité dans une autre, ou plus abstraitement d'un être-là dans un non-être-là ; il y a en cela une autre détermination que dans la gradualité, qui est seulement une augmentation ou une diminution et la fixation unilatérale à la grandeur.
Mais qu'un changement se manifestant comme simplement quantitatif se transforme subitement en un changement également qualitatif, c'est là une liaison qui avait déjà attiré l'attention des anciens, qui ont représenté dans des exemples populaires les conflits résultant de l'ignorance de cette liaison »... (405— 406) (« le chauve » : arracher un cheveu ; « le tas », enlever un grain...) « ce qui est réfuté c'est |
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das einseitige Festhalten an der abstrakten Quantumsbestimmtheit » (« la fixation unilatérale à la déterminité quantitative abstraite », c'est-à-dire sans tenir compte des changements et qualités concrètes de toutes sortes, etc.) ...« Aussi ces tours ne sont-ils point plaisanterie vide ou pédante, mais sont au contraire, en ce qu'ils ont de juste en eux-mêmes, des produits d'une conscience qui s'intéresse aux phénomènes qui surviennent dans le penser. |
NB |
Le quantum, pris comme limite indifférente, est l'aspect par lequel un être-là est attaqué subrepticement et conduit à sa perte. C'est la ruse du concept de saisir un être-là par l'aspect sous lequel sa qualité ne semble pas entrer en jeu et à la vérité au point que l'agrandissement d'un Etat, d'une fortune, etc., qui amène le malheur de l'Etat, du propriétaire, etc., apparaît même tout d'abord comme son bonheur » (407).
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« C'est un grand mérite que de faire connaissance avec les nombres empiriques de la nature, comme par exemple avec les distances qui séparent les planètes, mais c'est un mérite infiniment plus grand de faire disparaître les |
Gesetz oder Maß58 |
quanta empiriques, pour les élever à une forme universelle des déterminations quantitatives, de sorte qu'elles soient moments d'une loi ou mesure»; le mérite de Galilée et de Kepler... «Ils ont prouvé les lois qu'ils ont découvertes en |
? |
montrant que toute l'étendue des singularités de la perception leur correspond » (416). Mais il faut exiger un encore hdheres Beweisen ** de ces lois, à savoir que leurs déterminations quantitatives soient connues à partir des Qualitaten oder bestimmten Begrif-fen, die bezogen sind (wie Raum und Zeit ***). |
Le développement des concepts des Maßes en tant que spezifische Quantität et reales Maß59 (y compris les Wahlverwandtschaften60, par exemple, les éléments chimiques, les tons musicaux) est très obscur.
[Longue note sur la chimie, avec une polémique contre Berzelius et sa théorie électro-chimique (433—445).]
« La ligne nodale des rapports de mesures » (Knotenlinie von Maßverhältnissen) — passages de la quantité en qualité... Gradualité et sauts.
NB |
[Et derechef, p. 448, que la gradualité n'explique rien sans sauts.] |
NB |
Dans une note, comme toujours cnez Hegel, le factuel, les exemples, le concret. (C'est pourquoi Feuerbach ironise quelque part sur Hegel qui a renvoyé la nature en note. Feuerbach, Œuvres, II, p. ?) 6S61
P. 448—452, note, intitulée dans la table des matières (pas dans le texte ! ! pédantisme ! !) : « Exemples de telles lignes nodales ; sur ce qu'il n'y a pas de sauts dans la nature. » |
Les sauts ! |
Exemples : chimie ; tons musicaux ; eau (vapeur, glace) — p. 449 — enfantement et mort.
Abbrechen der Allmähligkeit62, 450. |
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Ruptures de la gradualité |
« Il n'y a pas de sauts dans la nature, dit-on ; et la représentation habituelle, quand elle a à comprendre un naître ou un périr, estime, comme on l'a rappelé, avoir compris en les représentant comme un surgir ou un disparaître graduels. |
Les sauts ! |
Mais il est apparu que les transformations de l'être en général ne sont pas seulement le passage d'une grandeur dans une autre, mais bien le passage du qualitatif dans le quantitatif et inversement, un être autre qui est une rupture du graduel, un qualitativement autre en face de l'être-là précédent. L'eau, en se refroidissant ne devient pas dure peu à peu de sorte qu'elle deviendrait comme de la purée et se solidifierait graduellement jusqu'à la consistance de la glace ; au contraire, elle est solide d'un seul coup ; même une fois la température de |
Les sauts ! |
congélation entièrement atteinte, si elle reste en repos, elle peut encore garder tout son état liquide et un infime ébranlement la met en état de solidité. |
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Pour ce qui est de la gradualité du naître, il y a au fond la représentation que ce qui naît est déjà présent de manière sensible ou en général de façon effectivement réelle et n'est pas encore perceptible seulement à cause de sa petitesse ; de même pour la gradualité du disparaître, il y a la représentation que le non-être ou l'autre qui survient à sa place est présent également, mais ne peut pas encore être remarqué ; — et présent non pas en ce sens que l'autre serait contenu dans l'autre existant, mais en ce sens qu'il est présent en tant qu'être-là, mais seulement indécelable. Le naître et le périr se trouvent par là supprimés en principe, c'est-à-dire que l'en-soi, l'intérieur en quoi quelque chose est avant son être-là, est transformé en une petite présence de l'être-là extérieur, et la différence essentielle, c'est-à-dire la différence du concept, est transformée en une différence extérieure simplement quantitative. Faire comprendre un naître ou un périr à partir de la gradualité du changement est ennuyeux comme l'est toute tautologie ; c'est tenir ce qui naît ou petit pour déjà tout achevé au préalable et faire du changement une simple transformation d'une différence extérieure, ce par quoi il n'est en fait qu'une tautologie. La difficulté pour un tel entendement voulant comprendre réside dans le passage qualitatif de quelque chose dans son autre en général et dans son opposé ; pour éviter cela, l'entendement se représente l'identité et le changement comme identité et changement indifférents et extérieurs du quantitatif.
Dans le moral, pour autant qu'il est considéré dans la sphère de l'être, a lieu le même passage du quantitatif en qualitatif ; et des qualités différentes apparaissent se fonder sur des différences de la quantité. Il existe un plus et un moins par quoi la mesure de la légèreté d'esprit est dépassée, et il apparaît quelque chose de tout à fait autre, le crime, par quoi le droit passe dans le non-droit, la vertu dans le vice. De même, les Etats, toutes choses étant égales par ailleurs, doivent à leurs différences de grandeur un caractère qualitatif différent »... (450—452).
Plus loin :
Le passage de l'être à l'essence (Wesen) est exposé avec la plus grande obscurité.
Fin du tome I.
Notes
1 En français dans le texte.
2 Du connaître.
3 Et le néant et l'être.
4 Détermination est déjà qualité.
5 Etre.
6 Etre-là.
7 Etre—Néant—Devenir.
8 Le néant au quelque chose.
9 Rien ne naît de rien ?
10 Etre déterminé.
11 In fine. A la fin.
12 N'est-ce pas ?
13 Réflexion extérieure.
14 Sophistiquerie.
15 L'apparaître et le disparaître.
16 L'abrogation du devenir — l'être-là.
17 Abroger = mettre fin = maintenir (conserver en même temps).
18 L'être-là est l'être déterminé (NB un [être] concret).
19 Autre — variable et fini.
20 Toute détermination est négation.
21 « Abstrakte und abstruse Hegelei » (« hégélianisme abstrait et abstrus »), expression d'Engels (voir Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande).
22 Chose en soi.
23 Etre pour l'autre.
24 Très bien ! !
25 L'impossibilité de la réponse est incluse sans qu'on s'en aperçoive dans la question même.
26 « Si nous pouvons prouver la justesse de notre conception d'un phénomène naturel en le créant nous-mêmes, en le produisant à l'aide de ses conditions, et, qui plus est, en le faisant servir à nos fins, c'en est fini de la « chose en soi » insaisissable de Kant. Les substances chimiques produites dans les organismes végétaux et animaux restèrent de telles « choses en soi » jusqu'à ce que la chimie organique se fût mise à les préparer l'une après l'autre ; par-là, la « chose en soi » devint une chose pour nous, comme par exemple, la matière colorante de la garance, l'alizarine, que nous ne faisons plus pousser dans les champs sous forme de racines de garance, mais que nous tirons bien plus simplement et à meilleur marché du goudron de houille. » Friedrich Engels, Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande.
27 En français dans le texte.
28 En français dans le texte.
29 Devoir être et borne, moments du fini.
30 Très bien !
31 Pulsion, douleur, etc.
32 Mauvais infini.
33 En deçà... au-delà.
34 Ils sont.
35 Untrennbar.
36 En français dans le texte.
37 Unité.
38 Atome.
39 Source du mouvement.
40 Contient.
41 Automouvement.
42 Transcendante (au sens kantien, péjoratif).
43 Posée.
44 Antinomie. Contradiction entre deux thèses également démontrables logiquement. Kant estimait que la raison humaine tombe inévitablement dans l'antinomie, dans la contradiction avec elle-même quand elle cherche à dépasser les limites de l'expérience sensible et à connaître le monde comme un tout. Il dénombrait quatre antinomies : 1) le monde a un commencement dans le temps et dans l'espace, et le monde est infini ; 2) toute substance complexe se compose de choses simples, et dans le monde il n'y a rien de simple ; 3) la liberté existe dans le monde, et tout est subordonné uniquement aux lois de la nature ; 4) il existe un être nécessaire (Dieu) en tant que partie ou cause du monde, et il n'y a aucun être absolument nécessaire. Ces antinomies servaient d'argument important en faveur de l'agnosticisme de Kant pour autant que, selon l'opinion de ce philosophe, elles indiquaient à la raison les frontières de ses possibilités et par là même préservaient la foi de ses atteintes. Cependant, dans la théorie des antinomies, Kant constatait le caractère objectif des contradictions dans la pensée connaissante, ce qui a contribué au développement de la dialectique. Hegel avait déjà indiqué le caractère formel, limité, des antinomies de Kant et les a critiquées. La dialectique matérialiste en expliquant scientifiquement la connaissance humaine, montra comment les antinomies se résolvent dans le processus qui conduit vers la vérité objective.
45 Continuité.
46 Discontinuité.
47 La vraie dialectique.
48 « Division, resserrement, succession », traduction de mots russes essayés par Lénine et rayés par lui sur le manuscrit.
49 Tout au long.
50 Lénine fait apparemment allusion ici aux considérations d'Engels dans l'Anti-Dühring sur l'infini mathématique et le caractère dialectique de la démonstration dans les mathématiques supérieures.
51 Légitimation.
52
Allusion au distique « la Question du droit », du poème
satirique de Schiller les Philosophes :
« Je me sers depuis longtemps de mon nez pour sentir :
Peut-on démontrer que j'ai le droit de m'en servir ? »
53 En allemand dans le texte (le mot est le même en allemand et en français).
54 Lénine fait visiblement allusion à ce que dit Engels sur le calcul différentiel et intégral dans l'Anti-Dühring.
55 En français dans le texte.
56 Rapport.
57 En français dans le texte.
58 Loi ou (c'est-à-dire) mesure.
59 De la mesure en tant que quantité spécifique et mesure réelle.
60 Affinités électives.
61 Lénine pense à la remarque de Feuerbach dans ses Thèses provisoires pour la réforme de la philosophie (« Vorlaüfige Thesen zur Reform der Philosophie ») : « Ce qui dans l'homme ne philosophe pas, ce qui bien plutôt est contre la philosophie, ce qui fait opposition à la pensée abstraite, bref ce que Hegel ravale au rang de note, le philosophe doit l'admettre dans le texte de la philosophie. » (Thèse 45).
62 Ruptures de la gradualité.